L'art de la citation (1) - Un Millénaire de rêves
Par GoldenLeaf, le 15/11/2025 à 18h28 (75 vues)
Le très récent Clair Obscur : Expédition 33 manie comme peu d'entre ses semblables l'art de la citation. En bon élève, l'aventure partie de Lumière affiche ses références, sans toutefois en reprendre, parfois, toute la profondeur. C'est ce que nous pouvons nous dire, notamment, en comparant les petits récits des expéditions antérieurs que l'on collecte à leur illustre modèle, le Millénaire de rêves, partie intégrante du discret Lost Odyssey.
A la fin des années 2000, nous ne le savons pas encore, mais le J-RPG (que nous n'appelons pas encore ainsi) s'apprête à décliner, emporté par la chute de la maison qui lui a donné ses lettres de noblesse : Square Enix. Lost Odyssey est, en quelque manière, un des derniers phares de la belle époque, mais aussi le résultat d'un affaissement déjà amorcé. Réalisé par Sakaguchi, il ne porte pas le logo SE du fait d'un divorce ayant eu lieu après le désastre financier que fut Final Fantasy : Les Créatures de l'esprit. Désormais libre, Hironobu travaille alors tantôt avec Nintendo (The Last Story), tantôt avec Microsoft - mais toujours sous la marque "Mistwalker".
Lost Odyssey survit aujourd'hui à titre de bizarrerie puisqu'il appartient à la catégorie assez réduite des J-RPG uniquement sortis sur XBOX (on lui adjoindrait, à ce titre, Infinite undiscovery, largement oubliable, et Magna Carta II, qui relève lui davantage de l'action). Calibré comme un Final Fantasy pur sucre, Lost Odyssey sonne parfois comme le onzième "vrai" FF. Souffrant peut-être d'une direction artistique trop austère, l'épopée de Kaïm est asurément un oiseau rare et un des seuls exemples de récit bâti ouvertement par un adulte pour les adultes. En effet, s'émouvoir et s'attacher à un protagoniste dont le rapport à la mort est justement celui d'un immortel demande un peu de vécu, surtout que notre héros, amnésique (j'ai écrit "pur sucre"), parfois voit resurgir des souvenirs de son passé infini et éprouve la dimension déchirante du temps qui passe.
Alors s'engagent de petites séquences narratives, pas si petites que cela d'ailleurs puisque le temps de lecture peut atteindre les dix minutes - ces passages relevant alors du véritable visual novel... sans le "visual" ou presque. C'est la première différence avec les reliques trouvées dans Clair Obscur : leur longueur. Adaptée à un grand public dans l'oeuvre de Sandfall, celle-ci ne fait aucun cadeau aux allergiques à la lecture dans Lost Odyssey.
Ce n'est cepedant pas là le point décisif.
Les reliques des expéditions passées enrichissent le lore lié à la Fracture. Ou plutôt le décorent de petites touches sympathiques n'ayant jamais de véritable poids sur la narration, et encore moins sur les personnages : il s'agit de petites tranches de vie aux styles variées, mettant très fugacement en scène des morts parmi d'autres. Au contraire, les souvenirs réveillés par Kaïm sont... les siens, et creusent donc le caractère de ce personnage froid comme une tombe. Le jeu révèle par ce moyen délicat mais exigeant ce que, en toute cohérence, le protagoniste n'est pas résolu à montrer. A ce titre, le Millénaire de rêves me semble tout à la fois plus touchant, plus consistant, mais aussi beaucoup plsu exigeant.
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