Persona est une série qui a reçu beaucoup d'attention ces derniers temps. En effet ces RPG, grâce à leur habillage soigné et classe ainsi que le gameplay efficace, ont su gagner le cœur de la plupart des fans du genre. Mais au fond, ces mêmes joueurs n'ont jamais connu les débuts de cette série, lorsqu'elle en était encore à son stade primitif, sans menu flashy ou musique J-Pop. C'est ici que ce portage amélioré du premier Persona entre en scène. Saura-t-il attirer l'œil des nouveaux joueurs ou reste-t-il un dungeon crawler similaire aux Wizardry ?
I saw a Butterfly
Un énième jour s'écoule paisiblement dans la ville de Mikage-cho. Afin de briser la monotonie quotidienne, un groupe de jeunes lycéens décide de jouer à un jeu nommé "Persona" dans une salle de classe vide. Ce jeu permet soi-disant d'invoquer les esprits, et quoi de mieux qu'un peu de mysticisme pour exciter ces chers étudiants, qui sont d'ailleurs tous des clichés de séries télévisées. Commençons tout d'abord par le héros, muet comme à l'habitude de la série. Ici son mutisme est quelque peu anecdotique, puisque rares seront les choix qui vous seront présentés, et même lorsque vous y aurez droit, il s'agira le plus souvent de choix qui mènent à la vraie fin du jeu, donc vous ne pourrez quasiment jamais donner votre avis. Notre héros est accompagné de Mark, joyeux fanfaron toujours prêt à plaisanter, Nanjou, petit bourgeois souffrant d'un complexe du supériorité, Yukino, ex-délinquante très classe, Brown, petit loser qui se prend pour un beau gosse, Elly, l'immigrée américaine un peu folle, Ayase, une co-girl (filles japonaises très maquillées, ressemblant à des poupées) très irritante et enfin Maki, l'héroïne du jeu souffrant d'une maladie inconnue. Il reste un dernier personnage, mais celui-ci est caché donc je laisse la surprise intacte.
Le rituel d'invocation se passe apparemment sans encombre, jusqu'à ce qu'une apparition se manifeste devant nos héros et que la foudre s'abatte sur quatre d'entre eux. Ces mêmes personnes font alors un rêve commun, ils sont invités dans la chambre d'un certain Philémon qui leur parle de leur personnalité intérieure qui, une fois révélée, permet l'utilisation de puissants pouvoirs : les Persona. Après un certain temps, notre héros et ses amis se réveillent sur le lit de la clinique de l'école. Leur professeur, Mademoiselle Saeko, leur ordonne d'aller à l'infirmerie pour confirmer si tout va bien. Ca tombe bien, ils pourront visiter leur amie Maki qui est malade depuis bien longtemps. Malheureusement pour eux, une fois qu'ils sont ensemble, Maki est victime d'une violente douleur et est immédiatement emmenée aux Soins Intensifs. C'est là que la vie à Mikage-cho change radicalement : les démons apparaissent et envahissent la ville, tandis que l'architecture des bâtiments change et devient totalement absurde. Pour changer la donne, les Persona mentionnés précédemment se réveillent en chacun des héros, qui sont alors prêts à défendre la ville contre tous les démons. L'aventure consistera alors à trouver la source de tous ces problèmes et d'y mettre fin.
Ce portage PSP présente de nouvelles séquences animées pour servir les passages scénaristiques les plus importants. Elles sont de bonne qualité, le design des personnages est très bien retranscrit et la mise en scène est dynamique. Le problème de la version japonaise, c'est que ces scènes ne sont pas vocalisées. S'il fallait faire des scènes animées, autant rajouter des voix pour atteindre la perfection. Je précise bien version japonaise, car Atlus USA a officiellement confirmé les avoir ajoutées pour la version américaine, très belle initiative !
L'histoire en elle-même n'est pas trop mauvaise, on voit bien que les concepts de la série n'en sont qu'à leurs balbutiements. Mais le plus gros problème de l'histoire est qu'elle est expédiée bien trop rapidement. Le jeu est largement axé sur le gameplay, et les rares cutscenes excèdent difficilement les cinq minutes. Enfin, le plus gros scandale reste l'obtention de la vraie fin, extrêmement importante puisqu'elle permet d'accéder au dernier donjon et au dernier boss. Il faut répondre correctement à toute une série de questions à un moment complètement anodin, et rien ne met en évidence les bons choix ! L'utilisation d'une soluce est donc obligatoire.
Hardcore Crawling
Passons maintenant au point le plus important du jeu, car il mise quasiment tout dessus : le gameplay. On se déplace dans les donjons en 3D à la première personne, les combats survenant aléatoirement durant l'exploration. La version PSP dote l'interface d'une mini-map très claire qui met en évidence les chemins non explorés, en ajoutant quelques petits effets sympathiques comme les traces de pas pour savoir d'où on est venu. Le bruit des pas du héros très dérangeants ont également été retirés, sa vitesse a été grandement augmentée et la pression d'un simple bouton permet de courir. Enfin, les portraits des membres de l'équipe ainsi que leur barre de HP et de SP font leur apparition à la droite de l'écran (comme dans Persona 3 et 4). L'exploration est donc on ne peut plus agréable, et le jeu nous donne tous les outils pour n'avoir aucun problème.
Les combats restent assez fréquents malgré une diminution notable de ceux-ci. Le plus gros avantage de ce portage selon moi fait alors son apparition : la possibilité de sauter les animations en appuyant simplement sur Start. Les combats qui étaient autrefois plutôt longs se terminent maintenant en quelques secondes.
Pour coller aux nouveaux Persona, le jeu propose trois modes de difficulté : Easy, Normal et Expert. Le problème, c'est que le jeu est tellement facile que ça en est désolant. J'ai commencé directement en Expert lors de ma première partie, je ne suis jamais mort et je n'ai jamais été au bord de la mort. Très décevant, surtout après Persona 4 qui proposait un challenge conséquent lors de la première partie, en Expert toujours. Ce problème est partiellement dû au déséquilibre complet dans la puissance des Persona, problème déjà présent dans la version originale et qui n'a pas été abordé. Pour mettre en évidence ce problème, prenons deux exemples : Gozu-Tennoh, persona niveau 18, possède le deuxième sort le plus puissant du jeu, Megidola, capable d'oblitérer tous les ennemis du jeu en maximum deux coups et ce jusqu'à la fin du jeu. A contrario, Shokuin, persona niveau 97, est l'un des pires du jeu. Un autre exemple : Lilim, niveau 21, possède la capacité d'absorber n'importe quel type de magie. Et croyez-moi, tant que vous êtes bien équipé, les attaques physiques ne vous feront absolument rien. Le détenteur de Lilim est donc, en théorie, invincible, à un niveau très bas. Tant de problèmes qui n'ont pas du tout été réglés avec le portage.
De plus, les résistances élémentaires sont toujours aussi confuses. Chaque démon possède ses résistances et ses faiblesses visibles directement, sans problème. Mais chaque démon appartient également à un groupe élémentaire, qui possèdent chacun leur propres résistances! Les démons de types Atomiques par exemple reflètent tous les attaques de type Almighty, mais chaque démon de ce groupe possède à son tour ses propres résistances ! Il est donc vraiment difficile d'exploiter les faiblesses et on se contente alors de balancer son sort le plus puissant en espérant que ça marche.
Conformément à la série, il est possible d'obtenir des Persona grâce à la Velvet Room (qui n'a ici aucune utilité scénaristique). Cependant, on ne les fusionne pas directement, le Persona n'est que le résultat. On fusionne des Spell Card, obtenues au préalable à travers les discussions avec les démons. Celles-ci sont d'ailleurs très simples : chaque démon possède quatre humeurs et des traits spécifiques, tandis que chaque personnage possède des actions qui leur sont spécifiques. Il suffit alors de faire correspondre la bonne action à un démon afin de déclencher de l'intérêt, l'humeur qui permet d'avoir des Spell Cards. Ce système est intéressant en théorie, mais il faut savoir que certaines actions déclenchent à coup sûr l'intérêt, il suffit alors d'en abuser pour un résultat positif. Encore une fois, problème présent dans la version originale, pas corrigé dans cette version PSP. La fusion en elle-même est également ultra profonde, avec énormément de facteurs à prendre en compte. C'est simple, Persona possède le meilleur système de fusion de toute la saga !
Enfin, le pire défaut du jeu n'est également pas corrigé : la distribution inégale d'expérience. Le montant d'expérience attribué à un personnage dépend des actions que celui-ci a effectué. Il est donc parfaitement possible qu'un écart de cinq niveaux s'établisse entre les personnages de l'équipe. Ce problème est incompréhensible puisqu'il a été corrigé dans la version PC du jeu sortie en 1998, et que cette version est antérieure à la version PSX...
Lone Prayer
Un autre changement très notable est la refonte complète des musiques. Ici pas de remix, mais une toute nouvelle OST. L'originale était tout bonnement parfaite : des sons électros très funky qui accompagnaient avec classe l'exploration et les combats. Malheureusement, les musiques du portage sont tout juste médiocres. Elles contrastent sévèrement avec l'ambiance du jeu : la J-Pop n'y a tout simplement pas sa place. L'effort est louable, Meguro a tenté d'actualiser le jeu avec ses compositions, mais là on a plus l'impression qu'il n'a jamais vu le jeu tourner (impossible, puisque c'est lui a qui dirigé le portage). Le constat n'est pas complètement négatif cependant, certaines pistes sont très bonnes et quelques unes surpassent même les originales (enfin, une seule). De plus, là où l'original proposait une musique différente pour chaque lieu et chaque événement, Meguro a fait preuve d'une paresse incroyable et n'a pas hésité à utiliser deux fois la même musique pour deux donjons différents ! Le pire reste le passage du Black Market : surpuissant dans la version PSX grâce à sa musique jazzy bien trippante, il devient complètement anodin ici car le thème utilisé est celui de la carte, banal comme tout.
Graphiquement le jeu est exactement le même. Les personnages sont en pâte à modeler lors des combats et les décors restent plutôt quelconques. Cependant, le chara design signé Kaneko n'est pas trop mauvais, ce n'est pas son meilleur travail mais ça reste acceptable, et les Personae sont bien entendu très beaux et surtout très bien animés.
Digital Devil Sadisme !
Un dernier paragraphe assez spécial où je vais parler de la Snow Queen Quest, quête secondaire très dense menant à une seconde fin et retirée de la version américaine originale. Elle présente une histoire alternative et se déroule entièrement dans le lycée de Mikage-cho. C'est de loin le meilleur endroit pour profiter du gameplay à son maximum, car les donjons qui s'y trouvent, au nombre de 4, sont parmi les plus longs jamais créés dans le monde des RPG ! En effet, tout, et je dis bien tout, est contre vous durant ces quêtes. Les donjons sont en fait des tours de difficulté variable : Hypnos, la plus simple, dure environ trois heures. Nemesis, de difficulté moyenne, dure environ cinq heures. Enfin Thanatos, de loin la plus difficile, dure environ 7 heures. Le tout sans sauvegarde à l'intérieur, bien évidemment.
Tout d'abord, chaque donjon possède un temps limité qu'il faut respecter sous peine d'échec. Ensuite, dans chaque tour se trouve des fragments de miroir, qu'il faut obligatoirement retrouver pour accéder au quatrième et dernier donjon. Enfin, chaque donjon possède une caractéristique particulièrement pénible : dans Hypnos, il faut accéder au Dream World pour réveiller les élèves et professeurs d'un sommeil éternel, ce qui fait perdre du temps et des ressources. Dans Nemesis, les zones d'ombre sont quasiment partout, ce qui rend le donjon très difficilement navigable. Enfin, Thanatos possède la pire chose jamais créée : à chaque mort d'un personnage en combat, il devient incapable d'utiliser ses Persona ! Non seulement ils ne peuvent pas lancer de sorts, mais leur défense magique devient nulle, ce qui fait que le personnage en question devient inutile. Le seul moyen de remédier à la situation est d'aller à Tartaros, zone située au premier étage de la tour. Bon courage si quelqu'un meurt au septième étage ! Bien entendu, la tour est infestée de démons possédant les sorts de mort subite (Mamudo et Mudoon principalement), et l'architecture des lieux est très labyrinthique. C'est comme si Atlus avait employé les pires sadiques du monde pour créer ce donjon !
Si tous les fragments de miroir sont récupérés, on accède au quatrième et dernier donjon de la quête, le donjon le plus long du jeu (qui m'a duré 9 heures). Heureusement, il existe des sauvegardes dans le donjon et il n'y a pas de condition dégueulasse pour pourrir le joueur.
Bref, la Snow Queen Quest est complètement géniale, et tout joueur fan de challenge se doit de la faire !
Finalement, ce portage apporte son lot de défauts et de qualités. La capacité d'éviter les combats et l'augmentation de la vitesse de déplacement est un plus non négligeable, mais les musiques et la paresse générale entachent le tableau. Persona reste un bon dungeon crawler que je recommande à tous les fans du genre, mais les autres peuvent passer leur chemin. Autrement dit, si vous avez aimé Persona 3 ou 4 grâce aux S Links ou à l'histoire, oubliez que ce jeu existe.
28/07/2009
|
- Un gameplay addictif
- Le système de fusion
- Les scènes animées
- Plusieurs personnages
- La Snow Queen Quest
|
- Les musiques
- L'histoire
- Le déséquilibre des Persona
- La distribution inégale d'expérience
|
GRAPHICS 3/5
SOUND/MUSIC 2.5/5
STORY 3/5
LENGTH 4/5
GAMEPLAY 4.5/5
|