Star Ocean: The Second Story (SO2) est un microcosme au sein de la saga Star Ocean. C’est sûrement le seul épisode qui se rapproche d'une unanimité en sa faveur.
SO2, c’est l’âge d’or de la série mais aussi de tri-Ace, studio qui semble aujourd’hui complètement déphasé de notre réalité, qui s'enfonce sans cesse dans des trips retro-nostalgiques tentant de reproduire ce qu’ils faisaient à leur grande époque.
Qu’ils ne soient pas à la tête du remake de SO2 apparaît alors d’autant plus cocasse.
Paradoxalement, leur absence est peut-être la meilleure chose qui pouvait arriver à la saga pour redorer son blason.
Du neuf avec du vieux
Si l’absence de tri-Ace peut déconcerter, il y a quand même moyen de se rassurer : le directeur créatif de Gemdrops est un ancien de tri-Ace. Ce remake n’est donc pas non plus une proposition qui ignore les fondations de tri-Ace. Néanmoins, Gemdrops n’est pas un studio enfermé dans le passé et regarde bien plus vers l’avant. Ce remake est ainsi l’occasion, et pour la première fois dans la saga, d’avoir une nouvelle vision, moderne, de l’épisode le plus plébiscité de la saga.
Cette review ne se veut nullement être une review générale sur SO2, et encore moins donner de l’ombre à la review du jeu original. Il sera question ici de focaliser un discours sur les choix qu’a entrepris ce remake vis-à-vis de l’original.
J’aimerais d’abord commencer par la question du dépaysement. Un joueur sortant du jeu PlayStation peut-il perdre ses repères avec ce remake ?
Seule une chose pourrait réellement le surprendre : les graphismes. Ce remake s’intègre dans la mouvance actuelle qui consiste à mélanger environnement totalement en 3D avec des sprites 2D. Au regard du rapport partiel qu’entretenait déjà le jeu original avec la 3D, c’est une continuité très pertinente et naturelle. Les sprites des personnages et des ennemis sont quasiment les mêmes. La seule différence est que ce sont des sprites qui réagissent à la lumière de l’environnement 3D. C’est ce qui fait le pont entre les deux représentations. Et cela marche très bien. Revenir, après cela, sur PlayStation est d’une grande violence tant ce remake donne à voir un espace qui lui semble plus propice. Celui-ci respecte d’autre part complètement le jeu PS1 dans la disposition des maisons, des pièces et des personnages. Le joueur de la première heure ne peut pas être perdu mais il sera surpris de voir que le jeu s’essaye à différents angles de caméra. Le jeu original a tendance à donner un point de vue éloigné de notre personnage dans les villes. Ici, nous sommes bien plus immergés à l’intérieur des murs.
Parle-t-on ici pour autant d’un jeu à couper le souffle graphiquement ? Non, pas du tout. Celui-ci est avant tout fonctionnel. Cette nouvelle 3D s’intègre bien à SO2 mais reste très formelle.
Après la fin des temps, le beau temps
Par-delà cette potentielle surprise, malgré les autres différences (et il y en a beaucoup), c’est un remake où l’on se sent aisément chez soi. L’histoire et les personnages sont identiques. Le charme des combats est le même. Et tout le contenu gargantuesque que l’on connaît répond toujours à l’appel. Aimer l’un, c’est aimer l’autre. Par contre, ne pas aimer l’original ne signifie pas nécessairement que l’on ne va pas aimer ce remake. Et c’est la force majeure de Star Ocean: The Second Story R.
Les jeux de tri-Ace ont cette tendance à ne pas expliquer des aspects de leur gameplay. Il en résulte des jeux qui peuvent être très frustrants. Il n’est malheureusement pas rare de passer à côté de mécanismes entiers en jouant à un jeu tri-Ace. On peut potentiellement y voir une intention qui peut être profitable pour le joueur quand on creuse un peu plus le sujet. Mais l’impression que cela donne surtout, c’est que ce sont juste des jeux mal designés.
Par exemple, depuis son premier épisode, la saga Star Ocean a un système qui s’appelle les Private Actions (PA). Ce sont des scènes optionnelles où les personnages vivent entre eux de petites histoires qui vont faire monter ou descendre l'affection qu'ils entretiennent les uns pour les autres. Elles sont nombreuses et apportent beaucoup de relief à des personnages souvent stéréotypés. Dans le SO2 original, ces affinités amènent même à avoir une montagne de fins annexes (84 fins différentes). Quant à comprendre comment déclencher ces scènes, où les trouver, et savoir quelle est l’affinité d’un personnage pour quelqu’un, cela, le jeu ne l’expliquait pas. Il n’est donc guère surprenant de voir des gens aller au bout de SO2 sans même avoir saisi l’existence de ce système, système pourtant reconnu d’autre part comme étant une caractéristique fondamentale de ce jeu et de la saga.
Avec ce remake, toute cette brume entretenue depuis des années par tri-Ace est dissipée. Parfois même avec trop d’insistance, cette nouvelle version veut être certaine que l'on a toutes les clefs pour comprendre tout ce que propose Star Ocean 2. Tutoriels à tout va, indications visuelles, menus repensés… Rien n’est laissé dans le flou. Tout est expliqué et tout est indiqué. Il est impossible de passer à côté de quelque chose.
Les Private Actions (PA) se retrouvent ainsi indiquées sur une carte du jeu avec à chaque fois la mention selon laquelle celle-ci est, ou non, limitée dans le temps. Le menu a également une section indiquant toutes les fins qui existent, comme une autre indiquant le niveau d’affinité de tous les personnages.
Outre les PA, il est judicieux d’évoquer d’autres ajustements comme la création d’objets. Dans le jeu original, il faut tester et noter des combinaisons d’objets pour finir par comprendre ce que l’on peut créer. Dans ce remake, on a une liste qui mentionne les objets que l’on peut confectionner, ce qui a le mérite d’être beaucoup plus clair. Cette version ajoute même le super système d’atouts de Star Ocean: The Divine Force (SO6). Avec l’avantage ici d’avoir aussi des explications sur son fonctionnement (ce que ne fait nullement SO6).
Bref, avec
Star Ocean 2 R, on ne marche plus dans l’inconnu.
Un contenu survitaminé
Le jeu propose d’autre part de nouvelles fonctionnalités qui permettent de garantir que la majorité des joueurs accèdent à tout ce contenu à moindre frais.
Le déplacement d’un point A à un point B est bien moins contraignant. Le jeu a beaucoup plus de points de sauvegardes qu’auparavant, et il est presque tout le temps possible de se téléporter d’un point à un autre. Dans la même lignée, les combats aléatoires pendant l’exploration sont remplacés par des monstres de couleurs visibles sur la carte. S’ils sont violets ou rouges, ils vont chercher à rentrer en contact avec le joueur pour déclencher un combat. S’ils sont verts, ils sont d’un niveau inférieur au joueur et ne l’attaqueront pas. Dans les deux cas, il en ressort souvent la possibilité de se déplacer sans déclencher de combats.
Cette version récompense énormément le joueur qui explore de fond en comble ce que propose le jeu. Des points d’intérêts sont disséminés à différents endroits du jeu. Les obtenir donne des récompenses, en plus de donner des renseignements sur le lieu. Des boss spéciaux avec de beaux trésors signent leur apparition sur la world map. Des guildes proposent des missions liées à la création d’objets. Et il y a même, désormais, des succès qui récompensent aussi le joueur !
Le jeu initial était déjà riche en contenu. Le voilà maintenant encore augenté, avec le luxe d’être à la portée de tous.
Stab the Shield of Justice (feat. Raymond Lawrence)
Le système de combat n’est pas en reste et propose une philosophie similaire. L’essence du jeu initial est toujours là, mais est aussi sujette à des changements rendant les affrontements plus abordables.
L’amélioration des compétences n’est plus liée à leur utilisation, mais à des points pouvant s’obtenir à chaque combat. Selon la même tendance, le leveling est beaucoup plus simple. Les personnages qui ne combattent pas gagnent aussi de l’expérience. Les ennemis donnent davantage d’expérience, et il y a plusieurs moyens d’augmenter son taux - notamment les formations de combats, qui déterminent la position de base des combattants et qui donnent, toutes, des bonus différents. Ces bonus de formation s’obtiennent en remplissant une jauge lorsqu’on parvient à faire des coups critiques.
Les sorts de symbologie profitent également d’une nette amélioration. Par exemple, plusieurs d’entre eux peuvent désormais toucher plusieurs cibles et infliger des malus.
Le fait d’ailleurs de pouvoir toucher plus facilement plusieurs ennemis est de manière générale l’un des grands changements de cette version.
Mais c’est surtout les systèmes d’assauts et de boucliers qui vont retenir l’attention.
Désormais, tous les ennemis ont une barre de vie visible et une barre de bouclier. Réussir à vider la barre de bouclier permet d’hébéter l’ennemi et de toujours lui infliger des coups critiques durant ce laps de temps. En conséquence de cet ajout, chaque compétence s’est vue associée à une spécialité indiquant si elle est plus efficace pour frapper le bouclier de l’ennemi ou pour lui retirer des points de vie. A cela se rajoute un système d’esquive. Si on appuie au bon moment sur une touche, on peut désormais esquiver et parfois infliger une contre-attaque réduisant les boucliers.
Quant au système d’assaut, il permet d’assigner aux personnages non-combattants une de leurs compétences, que l’on va pouvoir utiliser pendant le combat. À l’instar de la jauge de formation, chaque personnage assigné dispose de sa propre jauge qui se remplit avec le temps et en frappant. En plus des non-combattants de notre équipe, on peut aussi obtenir des personnages qui ne peuvent intervenir qu’en assaut. Ces derniers ne sont ni plus ni moins que des personnages issus des précédents Star Ocean.
Si la forme globale des combats reste identique, tous ses changements les rendent tout de même bien différents du jeu original. Ses nombreuses différences lui apportent une nervosité et un dynamisme sans pareil.
Mais il est bon de garder à l’esprit que ces ajouts rendent le jeu beaucoup plus facile.
On pourrait facilement reprocher à ce remake, que ce soit pour les combats comme pour le reste, d’en faire un peu trop et pas forcément au bon endroit.
À tout donner dans un souci d’accessibilité, ce remake est dans l’extrême opposé d’un jeu tri-Ace. Nous passons d’un jeu qui n’explique rien à un jeu qui explique tout, mais vraiment tout. Et d’autre part d’un jeu qui récompense timidement à un jeu qui récompense presque abusivement.
Après les premières heures où tout est encore nouveau, il en ressort un Star Ocean 2 R qui peut être moins surprenant et satisfaisant sur la durée.
La licence Star Ocean livre ici pour la première fois un jeu sans ses déséquilibres habituels. Star Ocean: The Second Story R est enfin (?) un Star Ocean en phase avec son temps. L’âme du jeu original est toujours là tout en étant remaniée par une myriade d’ajouts rendant le jeu beaucoup plus accessible, fluide et dynamique. Plusieurs de ces changements font incontestablement de cette version la meilleure à jouer.
Ce remake est sans difficulté l’une des meilleures expériences que l’on peut avoir de Star Ocean et touche de près l’exemple à suivre en matière de remake de ce genre de jeu.
Son seul véritable défaut réside dans son souhait démesuré d’être accessible au plus grand nombre. Mais la démesure n’est-elle pas une marque indélébile de la saga ?
05/09/2024
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- Les options d'accessibilité
- Le remaniement des menus
- Le nouveau contenu
- Encore plus dynamique et nerveux que le jeu original
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- Beaucoup plus facile
- Moins surprenant à long terme
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GRAPHICS 3.5/5
LENGTH 4/5
GAMEPLAY 4/5
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