L'inusable PSP, qui continue encore d'accueillir des jeux au Japon, n'est plus soutenue par le marché occidental qui tente autant que faire se peut de lancer sa remplaçante la PS Vita. Sur l'archipel, le studio
Imageepoch annonce que
Sol Trigger sera son dernier projet sur la première portable de
Sony, mais aussi le plus onéreux. Ce chant du cygne sera-t-il salvateur pour nous, les joueurs ? Réponse dans ce test !
Sol Trigger
Nous sommes dans un monde d'anticipation au sein d'une cité du nom de Kaiserhald. Cette ville est régie par un Ordre religieux qui doit sa force à une source d'énergie baptisée "Sol" et qui serait capable d'accomplir des miracles comme en témoignent les nombreuses améliorations technologiques, des luminaires aux composants des machines qui octroient un certain confort de vie.
Dans l'ombre, un petit groupe d'intervention privé du nom de Sol Trigger sait très bien que cette manipulation dans la désinformation n'est qu'un leurre et que le "Sol" n'est qu'une énergie utilisée à des fins corrompues. Le Sol Trigger ne se fait donc pas prier pour utiliser à son tour cette ressource contre son ennemi. C'est ainsi que lors d'un rassemblement presque sectaire sur la grande place que le groupe décide de saboter les réjouissances pour libérer des soi-disant hérétiques osant confondre l'Ordre. La mission est un succès mais lors de la fuite, notre groupe est intercepté par Istvan qui est le principal leader des forces adverses. Dépassés par les évènements, nos héros ne doivent le salut qu'au sacrifice du vétéran Donei, qui n'hésite pas une seule seconde à laisser la relève prendre la tête du mouvement.
C'est dans ce contexte fragile et incertain que Sol Trigger découvre rapidement que la source d'énergie est prélevée sur les corps des humains. Une méthode odieuse qu'il faut impérativement stopper, mais à quel prix ?
L'histoire de
Sol Trigger pose un background assez particulier puisque toute la progression n'a lieu qu'à un seul endroit, la cité d'origine un peu comme si Midgar était le seul terrain de jeu de
Final Fantasy VII. En proposant des thématiques assez riches - quoiqu'elles mériteraient plus de profondeur - et une narration très orientée "japanime" le jeu ne perd pas une seule seconde dans des séquences superficielles. Ici point de scènes dans la boulangerie du coin et encore moins de réflexions pseudo-philosophiques d'un ennui mortel. Non,
Sol Trigger va à l'essentiel dans le souci permanent de garder un rythme cohérent et relevé, comme une série dont le dernier épisode en cours termine de manière si alléchante qu'on enchaîne directement avec le suivant.
Le jeu puise sa force dans un élément particulier : ses personnages. L'équipe Sol Trigger est composée de six membres sur le terrain, Farel qui va se retrouver leader malgré lui, Ema fragile mais d'une volonté inouïe, Valter taciturne avec un grand sens de justice, Gustaf est écorché derrière son masque bourru, Cyril la gamine surexcitée qui trouve les mots justes et enfin Sophie, top-model du groupe hyper rationnelle mais d'une grande sensibilité intérieure. Cette équipe est d'une homogénéité stupéfiante, au point qu'elle donne un sens premier au RPG "héros ou groupe de héros dans une quête visant généralement à sauver le monde". Le sens "groupe de héros" n'a jamais été aussi vrai ici, car qui n'a jamais mis la moitié de la team sur la touche dans la plupart des RPG, juste parce que des personnages n'avaient pas de charisme ou que leurs compétences étaient inutiles, voire les deux. Dans
Sol Trigger si vous enlevez un personnage au groupe c'est comme un coup de poignard en plein cœur, car il s'agit avant tout de faire une mission "à l'unisson".
Pourtant, les scénaristes ne vont pas hésiter une seule seconde à porter ce coup de poignard puisque vers la moitié du jeu, notre merveilleuse team va purement et simplement disparaître, remplacée qu'elle sera par un trio de jeunes beaucoup plus fashion victimes pour employer des mots tendances. Je souhaite garder un maximum de surprises mais sachez que d'un, nos jeunes vont tout de même évoluer (surtout Lars, leader de ce deuxième groupe) et de deux, les autres personnages sont excellents mais chut, je n'en dirai pas plus.
Très déstabilisant surtout avec un "to be continued" et le staff de fin entre les deux phases, sachez que le trou de 19 ans séparant les évènements n'est en fait qu'une préparation logique de ce qui vous attend. Puis bon, les protagonistes nous intéressent vraiment par l'efficacité avec laquelle ils traitent leurs problèmes (on ne s'éternise pas, on réfléchit vite et juste) et c'est aussi un des rares RPG japonais où les relations amoureuses, car il y en a, termine au lit. Des héros qui concluent, on voit pas ça tous les jours donc autant en profiter.
Je pourrai égayer encore tout le bien qu'offre l'univers de
Sol Trigger à ses joueurs, mais le mieux reste de tester tout ça soi-même, histoire de féliciter
Imageepoch pour dépoussiérer un peu les caricatures du RPG nippon.
Program Sol
Vu l'investissement financier présumé du studio, c'est une partie sur laquelle les développeurs étaient attendus de pied ferme, et ils ont répondu globalement présent. Un très bon chara-design de
Shuji Sogabe (
God Eater), une interface épurée d'éventuelles surcharges et des dessins animées produits par
J.C. Staff, on peut dire que c'est mettre les petits plats dans les grands.
RPG en 3D,
Sol Trigger propose une progression à mi-chemin entre le RPG dit classique et le donjon. Vous avez en effet une structure très basique assez linéaire et une architecture perpendiculaire un brin labyrinthique dont le meilleur exemple est
Persona 4. Sauf que dans notre jeu les donjons ne sont pas assez longs et tortueux pour s'y perdre d'un côté, ils ne sont pas assez courts et simplifiés pour parler de ligne droite de l'autre. On reste donc dans le schéma d'origine qui vise à rendre le jeu suffisamment captivant sans pour autant nous étouffer, le rythme avant tout en somme. Maintenant le contrecoup de ces choix vient des décors qui, même s'ils sont assez variés, restent assez peu détaillés et lorsqu'en plus vous déplacez un personnage avec une seule animation (courir), on commence à douter du résultat.
En fait, c'est lors des cut-scenes et des combats qu'on voit le vrai potentiel d'un jeu qui exploite la PSP au maximum de ses capacités. Des personnages aux lignes racées, des animations bluffantes, un vrai souci de mise en scène auréolé de multiples effets graphiques, pas de doute c'est du grand spectacle. A ce titre les ennemis et les boss ont bénéficié d'un soin tout particulier très plaisant. Pourtant, si le résultat est satisfaisant il y a un très gros problème avec l'aliasing. C'est vrai que la PSP ne gère pas très bien ce paramètre mais là c'est vraiment beaucoup avec un scintillement quasiment permanent et très agressif. Autre détail de l'ordre de la finition, il faudra qu'on m'explique pourquoi Lars qui a les yeux dorés possède des yeux bleus sur l'artwork ou encore Sophie, qui s'écrit parfois Sophy sans explications. Mais certes, si ces éléments sont ennuyeux il y a d'autres types d'arguments.
C'est le cas des musiques, qui sont parfaitement dans le ton avec des mélodies très rock que ne renieraient pas un
Sakuraba et d'autres pistes plus calmes ou épiques. En tout cas, l'utilisation en cours de jeu fait vraiment plaisir à entendre et la bande-son dans son ensemble a tendance à porter le jeu vers le haut, tout comme les dialogues très réussis. Mais, car il y a un mais, on ne peut pas en dire autant niveau bruitages, très limités avec notamment une pierre à jeter au responsable du bruit des pas, cet espèce de son disgracieux qui donne l'impression que tout le monde marche avec des talons sur un parquet, alors je ne vous fais pas un dessin lorsque cinq larrons entrent dans une pièce...
Sol system
Sol Trigger est un RPG en 3D de type classical avec une structure assez proche du donjon-RPG. La grande force du jeu vient du rythme infernal en ayant au préalable allégé le titre de tout le superficiel. Un quartier général où on revient à chaque début de chapitre, une boutique unique, des discussions qui dépassent rarement les trois minutes, un système pour accélérer la cadence des combats en temps réel, des donjons pas trop longs, pas d’exploration au sens propre, absence de quêtes annexes (!)... On sent que le but est de proposer un RPG narratif mais cependant complet et surtout amusant. En fait, en y regardant de plus près, on constate que ce schéma est très proche de
Final Fantasy XIII et sa fuite vers l'avant, sauf que
FFXIII était trop long, avec des scènes dispensables et des combats parfois laborieux. Je vous laisse imaginer le résultat avec disons… 20h de moins, et vous aurez une idée de ce concept assez nouveau pour le RPG japonais, un concept qui prend tout son sens dans
Sol Trigger.
Les donjons font dans le très classique, un plan à découvrir en progressant, des coffres à ouvrir, quelques mécanismes à actionner, le tout avec quelques points de sauvegarde suffisamment proches qui permettent de recharger la vie et l'énergie sol en revenant au QG. Ça vous permet aussi d'aller consulter la boutique et revendre tout ce que vous avez récupéré, histoire à la fois d'avoir de l'argent mais également d'upgrader les équipements (arme, armure, accessoire) puisque la vendeuse a besoin de matières premières. Généralement, vous êtes presque certain que les matières du donjon en cours permettront d'obtenir l'équipement à niveau pour le donjon suivant. Ce procédé favorise aussi le rythme du jeu, mais force instinctivement à faire chaque zone à 100%, ce qui, vu que les donjons ne sont pas très longs, leur enlève la sensation légèrement linéaire de leur traversée, elle-même interrompue par un écran de transition aléatoire.
Combats
Les affrontements se jouent à quatre personnages (les deux réservistes sont disponibles à tout moment hors combat) en tour par tour et en vue subjective. Le résultat est presque similaire à
Saigo no Yakusoku no Monogatari et
7th Dragon 2020, deux anciens jeux d'
Imageepoch. Cette synthèse garantit au moins une chose : les combats seront à la fois dynamiques et rapides avec en plus une touche pour accélérer le déroulement dans
Sol Trigger. Au bas mot, cela permet de diviser les combats en temps par deux ou trois.
L'interface propose le désormais traditionnel affichage des tours et les actions suivantes : attaque, skill, objets, garde et fuite. Tout l'intérêt vient des skills. Ces derniers s'obtiennent sur les armes (skills offensifs) et sur les accessoires (skills de support) par l'intermédiaire d'un mode "Awake", ou plus simplement le réveil lors des combats. Chaque skill possède sa propre expérience et évolue au fil des utilisations, permettant de débloquer d'autres aptitudes. Par exemple une technique de Cyril donne "defense up" sur un personnage au niveau 1, toute l'équipe au niveau 2, toute l'équipe + "attack up" au niveau 4 et ainsi de suite. L'atout de ce procédé vient de la jauge "Sol", qui permet via le bouton de tranche de sacrifier un gros surplus d'énergie pour accéder aux niveaux plus élevés mais aussi plus intéressants du skill, sachant qu'au niveau maître, vous avez un finish spécial très gourmand en énergie mais aussi très utile (type extra-tour, dégâts +1000%...), généralement avec la mise en scène qui va bien, parfois spectaculaire.
Les autres skills sont les supports. Toujours en mode "Awake", un personnage peut développer des compétences de type attaque ou défense améliorée, couverture, contre-attaque, consommation d'énergie divisée par deux, sacrifier sa vie pour relever un mort... La force de ce système, c'est que les personnages appliquent les skills de façon aléatoire (mais fréquente) au moment où l'action adéquate se profile. Autre exemple vous utilisez votre super attaque, au moment où la séquence se lance un personnage stoppe l'action pour vous offrir le skill d'économie d'énergie ou un boost en attaque. Valable en défense également avec un ennemi qui veut broyer votre guérisseuse mal en point et d'un coup vous aurez un défense up ou une couverture. Ce qu'il faut savoir, c'est que tout le monde aide tout le monde et que parfois vous pouvez faire des chains. Support d'attaque + support de défense + contre-attaque même si vous n'êtes pas ciblé, histoire de faire payer l'affront de s'en prendre à vos compagnons.
C'est ça
Sol Trigger, une équipe à l'unisson qui s'entraide dans la douleur avec un grand sens du sacrifice digne d’un
Saint Seiya, offrant par là même des séquences jubilatoires mais aussi parfois très tristes. A ce titre, la fin en témoignera selon vos choix dans la première partie puisqu'en effet, il faudra choisir un chemin qui va altérer des séquences (mais vraiment) dont la fin du jeu. C'est la seule véritable annexe, puisqu'il faut refaire le soft pour choisir une autre route.
Ce concept parfaitement huilé misant tout sur son rythme avec une structure cohérente et bien étudiée possède quelques points discutables. La fréquence des points de sauvegarde permet de ne pas s'économiser un seul instant (à deux ou trois donjons près), on rentre souvent dans le tas en utilisant l'énergie sol au maximum. On peut comprendre que les développeurs ne veulent pas frustrer les joueurs dans le rythme, mais plus de challenge aurait offert une plus grande portée au système de combat, déjà qu'on a tendance à se taper des configurations identiques d'ennemis qu'on finit par connaître par cœur. Le recyclage est aussi de la partie puisque la deuxième phase vous fera revisiter certains donjons connus, même si un léger lifting évite la redite complète. Enfin, 25h suffiront pour boucler l'aventure puisqu'il n'y a pas de quêtes annexes (hormis les routes donc qui sont loin d'être anecdotiques), ce qui peut sembler court même si la concurrence vendrait un jeu de 40h dans des conditions similaires.
Sol Trigger ou les adieux brillants d'Imageepoch à la PSP. Un jeu puissant, au rythme infernal et porté par des personnages géniaux qui forment une véritable équipe. Certes, quelques problèmes de finition entachent l'expérience et le concept ne fera pas l'unanimité auprès des joueurs qui veulent plus de contrôle. Mais bon, du moment que l'on s'éclate et qu'on ressent des émotions fortes vecteur de souvenir, le jeu n'a-t-il pas déjà rempli sa mission ? Pour le savoir il ne vous reste plus qu'à vous lancer dans cette aventure unique qui s'impose sans problèmes comme un jeu à faire sur PSP et probablement le meilleur RPG de l'année sur cette machine.
24/10/2012
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- Un très bon rythme
- D'excellents personnages pour un vrai travail d'équipe
- Ambiance à la hauteur
- Histoire accrocheuse
- Combats dynamiques et amusants
- Un concept au point...
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- ...mais qui ne plaira pas à tout le monde
- Trop facile dans l'ensemble
- Des soucis de finition et trop d'aliasing
- Le bruitage des pas
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GRAPHICS 3.5/5
SOUND/MUSIC 4/5
STORY 4/5
LENGTH 3.5/5
GAMEPLAY 3.5/5
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