Dans Kowloon's Gate, la Chine est défigurée et s'abrutit dans un univers gothique où tradition rime avec perdition. Établit dans un monde à l'agonie, Kowloon's Gate propage un feeling zen pourtant épatant. Un mot semble pouvoir parfaitement décrire ce Hong Kong surréaliste :
妄 - Moo - sans ordre, sans raison. Dans Kowloon's Gate, quand les gens sont trop attachés à un objet ou à une idée, ils deviennent cette chose. Un homme qui épiera ses voisines par le trou de la serrure deviendra physiquement de plus en plus un homme trou à serrure. Chaque homme voit ses illusions se transformer en cauchemars et l'univers entier se remplis d'entités ubuesques. Kowloon's gate exploite avec brio ce thème très
Fluxus dans lequel les hommes deviennent les objets, et se place entre idiotie et satire de mauvais gout. Sony nous offre pour le coup un RPG bien
chelou au style particulier et fort intelligent, à découvrir absolument.
Welcome to the Freak Show !
Grâce à son concept surréaliste, l'étrange spectacle de monstre que nous propose Kowloons Gate est unique en son genre. En s'inspirant du mouvement Fluxus et des œuvres de
Nam June Paik, Kouki Inoue (le directeur du projet Kowloon's Gate) conçoit ici un incroyable cabaret. Les mutants dans Kowloon's Gate sont des être humains qui sont devenus physiquement l'objet de leur désire. En ressort un bestiaire excentrique et ironique à souhait, au mauvais gout exacerbé mais clairement contemporain. Certaines idées intéressantes sont utilisés à diverses reprises : plusieurs mutants sont devenus des espèces de créatures à forme de télévisions et d'ordinateurs, où quand l'homme devient dépendant des médias. La dépendance est d'ailleurs un thème surexploité dans Kowloon's Gate. L'être humain qui devient dépendant d'une machine ou d'une idée se transforme en celle-ci. Êtes vous près survivre parmi les femmes baignoires, les hommes serrures, les mecs ventilateurs, les tableaux à têtes humaines, les corps assaillis d'écran de TV ou les hommes poteau électrique ? Kouki Inoue a sus apprécié
Denchu Kozo no Bouken à sa juste valeur.
A disséquer dans cette galerie exhaustive:
Galerie de monstre de Kowloon's Gate
Kowloon's Gate, la satire
Kowloon's Gate est un jeu incroyablement bien tourné. Kouki Inoue est un amateur d'art vidéo, de cinéma dadaiste et de pièces de théâtre à la tournure grotesque. Il lit Alfred Jarry et s'amuse devant les pièces d'Hideki Noda. Les personnages et les créatures du jeu sont alors pensés comme les héros de leurs propres actes idéalement grotesques. Et à l'instar des quelques crevards qui investissent l'unique ville de Baroque (métamorphosés en créatures à priori peu rationnelles, mais qui sont en vérité l'image même de leurs plus grandes tares), chaque personnage dans Kowloon's Gate expose ses vices à la face du monde, dans un esprit des plus satiriques. Car chaque créature, avant de devenir créature, était un humain comme le joueur, errant dans la ville de Kowloon. C'est à cause de leurs perversité qu'ils se sont transformés en l'objet de leur désir, et qu'ils sont désormais prostitués comme de simples bibelots que l'on peux manipuler à notre guise.
Kowloon's Gate exploite surtout les principes Yin & Yang et Feng Shui. Enfoncé dans les traditions chinoises et pseudo bouddhistes, Kowloon's Gate nous révèle alors son véritable objectif : être un RPG pacifique, où on ne se fight pas à base de coups et de sang.
Kowloon's Gate prend place en 1997 à Hong Kong et met en scène les 9 Dragons (9 Tatsuki) qui sont soudainement apparus dans notre monde. Ces 9 dragons proviennent d'un monde parallèle qui existe dans un autre espace temps, mais un bouleversement des règles Feng Shui qui régissaient alors le multivers global a produit des évènements obscures qui ont poussés les deux mondes à se rencontrer. Le héros du jeu se doit donc d'infiltrer cette organisation des 9 dragons et d'empêcher le monde d'être détruit en rééquilibrant la balance du Yin et du Yang. Car c'est cette balance instable entre le yin et le yang (qui se doit d'être totalement en harmonie) qui a pour effet de déséquilibrer le monde et qui créé toutes les anomalies. Et c'est finalement le pont de Kowloon (le Kowloon's Gate) qui servira de lien entre les 2 espaces temps, entre le yin et le yang.
Gameplay Zen
Kowloon's Gate assume son côté zen. En tant que RPG atypique, il ne pouvait pas se permettre de calquer son système de jeu sur ses voisins. C'est pourtant le plus simplement du monde qu'il impose son style. Kowloon's Gate se déroule en vue subjective et se joue à priori comme un jeu d'aventure typé Myst ou Riven. Ou comme
deSPIRIA. On avance d'écran en écran, d'un point fixe à un point fixe. On clique sur l'endroit où l'on veut se diriger et la vue subjective avance dans cette direction automatiquement de manière extrêmement fluide grâce à des vidéos de transitions. Cette partie très orthodoxe que l'on appelle le Jpeg Dungeon (puisqu'on avance d'image en image, d'écran en écran) à lieu durant toutes les phases de recherche dans Kowloon, et permet de résoudre les 50 quêtes ou épisodes du jeu. Il n'y a pas de combat dans le Jpeg Dungeon, on peut donc savourer à sa juste valeur l'ambiance excentrique de Kowloon sans être interrompu. En général, les quêtes impliqueront au joueur de faire une petite excursion dans les vrais donjons du jeu, qui eux se jouent en temps réel (mais toujours en vue subjective). Ces donjons en temps réels se déroule alors comme un D-RPG typique (
Wizardry,
Baroque) : on est en vue subjective et on avance à sa guise dans le dédale. Ses phases sont impératives puisqu'il faudra pourchasser les mutants afin de sécuriser le donjon. Les architectures sont compliqués et la progression s'avère assez déroutante, mais une carte du lieu sera évidemment là en cas de besoin. A chaque fois que l'on s'approche d'un mutant, l'écran clignote pour nous informer de la présence ennemis. Il faudra alors découvrir l'endroit ou il se cache pour le combattre.
C'est là que Kowloon's Gate montre brillamment sa différence. Les combats sont là aussi de 2 sortes : il y'a les Feng Shui Battles contre les ennemis normaux et les Item Battles lors des affrontements contre les boss.
En mode Feng Shui, les combats se déroulent grâce à un cercle de 5 éléments que l'on appel le
Yi Jing, le "Livre des Mutations". Originellement, le
Yi Jing possède 8 éléments naturels mais Kowloon's Gate ne nous en soumet que 5. Chaque mutant rencontré dans le jeu possède un élément majeur parmi son
Yi Jing. Afin de le détruire, il faudra l'attaquer avec l'élément opposé au sien, ou bien absorber les 5 éléments de son
Yi Jing.
Lors des rencontres avec les Boss, c'est au système de combat basé sur les Items que l'on aura affaire. Le
Yi Jing disparait car le point faible de l'ennemi sera un Item que le joueur devra logiquement posséder. C'est lors de la phase de recherche dans le Jpeg Dungeon que l'on découvrira quel Item devra être utiliser sur le boss. En somme, une fois que l'on sait ce qu'on doit faire, les combats sont une promenade de santé. Kowloon's Gate pratique la Zen Attitude et les combats reflètent cet esprit : si tu sais ce que tu fait, tu t'en sortira aisément.
Technique nique nique
Kowloon's Gate, en plus de proposer un gameplay relaxant et original, profite d'une réalisation relativement hors norme. Sous la direction artistique du brillant Kouki Inoue (l'homme du match), Artdink (qui s'est vu largement aidé financièrement grâce aux apports de Sony, l'éditeur) a mis au point un moteur graphique capable d'afficher telles qu'elles des images de haute qualité (jpeg). On a pour le coup véritablement l'impression de se balader dans cette cité délabrée qu'est le getho de Kowloon. Les ambiances et les teintes restent très sombre voire ternes tout au long du jeu, mais poussent très loin le coté post apocalyptique et le joueur se sent régulièrement mal à l'aise. Du reste, les errances du joueur sont amplifiée de manière crue car chaque déplacement se fait par un mouvement de caméra d'une fluidité exemplaire (bien qu'assez lent) qui file parfois le tourni. Seuls les donjons sont graphiquement en deça, puisque la 3D utilisée est des plus basiques, façon Persona premier du nom. Les textures s'enchènent et se ressemblent dans ce qu'on pourrait imaginer (si on était un peu de mauvaise fois) être toujours le même donjon.
Kuniaki Haishima, compositeur du jeu, ajoute sa pierre à l'édifice en créant une bande son typée musique traditionnelle chinoise mais revisitée pour l'occasion par un homme du 20ème siècle. Les compositions sont toujours soutenues de percussions chinoises et de délire vocaux et sombrent souvent dans le thème d'ambiance pur et dur qui convient à merveille à Kowloon's Gate. L'atmosphère y est magnifiée car l'homme parvient à donner une forte dimension à sa musique, notamment grace à des instruments inhabituels et à des harmonies qui ne tombent jamais dans la facilité. La bande son est certainement la plus belle réussite de Kowloon's Gate et est digne des meilleures performances (avec PainKiller en 2005) de
Liu Sola en mélangeant free jazz, blues, expérimental et musique chinoise traditionnelle.
Kowloon Sim - Kowloon dans Second Life
Le drame de l'histoire, qui conclut cette pièce de théâtre comme si c'était une tragédie, c'est que nous n'aurons jamais de suite à Kowloon's Gate. Kouki Inoue nous l'a répété plusieurs fois à travers son blog, une suite serait véritablement improbable. Mais l'homme, quand même suffisamment dévoué, nous a pondus une reconstruction de la ville de Kowloon dans Second Life comme elle était représentée dans Kowloon's Gate. Kouki Inoue aime les MMORPG et Second Life l'a séduit avec facilité ; il est quand même l'homme derrière le projet .hack et son monde massivement multijoueur factice. La légende dit que Kouki possède un personnage dans Second Life mais comme son pseudonyme n'a pas été révélé, personne ne l'a jamais rencontré dans Kowloon Sim.
http://slurl.com/secondlife/kowloon/147/11/24
Kowloon's Gate est surprenant, scary, somptueux, freaké. Un D-RPG en vue subjective qui rappellera
Baroque ou
deSPIRIA, avec des personnages surréalistes et une ambiance rouillée du meilleur acabit. La bande-son est grandiose, elle plonge le joueur dans une atmosphère indescriptible, et le système de combat relaxant est surprenant, un peu à la
Nenu Lu Masu - Sleeping Cocoon.
Sony a sortit le grand jeu pour ce RPG zen et Feng Shui de 4cds, à grande dose de cinématique et de voix digitalisées. Un soft brillant, à l'ambiance torturée pas caricaturale du tout!
22/09/2008
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- L'allure inhabituelle et le coté fluxus du bestiaire
- L'ambiance unique du getho de Kowloon est parfaitement retranscrite
- La bande son suscite l'admiration
- Le moteur graphique maitrisé
- Le gameplay zen qui flirte entre 2 systèmes de combat est unique
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- Les mouvements de caméra, pourtant réussis, sont répétitifs et longuets
- Les donjons manquent de variété et la 3D utilisée est décevante
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GRAPHICS 4/5
SOUND/MUSIC 4.5/5
STORY 4/5
LENGTH 4/5
GAMEPLAY 3.5/5
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