Castlevania 64 avait osé faire le premier pas. Difficile de passer en premier, surtout avec une technologie naissante très perfectible. Et bien qu'applaudi en grandes pompes à sa sortie par la presse et les joueurs, il est très vite devenu le vilain petit canard de la série.
Trois ans plus tard débarquait alors
Lament of Innocence, l'opus salvateur sensé faire table rase des expériences passées. Une attente démesurée reposait logiquement sur ses épaules, d'autant plus que
Metroid Prime avait prouvé au monde entier que le genre
– acquis depuis
Symphony of the Night – pouvait parfaitement se transposer avec brio en trois dimensions.
Prologue
L'histoire se passe au XIe siècle, en ces temps où la paix est encore protégée par des légions de Chevaliers. À leur tête officient deux jeunes prodiges : Mathias Cronqvist et Leon Belmont, deux amis très soudés. Emportés par les croisades à des milles à l'est de leur pays natif, leur route se divisa… et leur destin tragique se mit en branle.
Mathias revint assez tôt, victorieux de sa campagne. Mais son retour n'était pas des plus réjouissants : sa femme Elisabetha était morte. Profondément ébranlé par cette nouvelle, il tomba alité durant des semaines entières. On n'entendit plus parler de lui…
Une année entière passa alors avant que Leon ne fit son retour avec son armée, toujours invaincue au combat. Mais d'étranges phénomènes envahissaient son domaine, les monstres ravageaient les terres et pire : sa bien-aimée, Sara, fut enlevée…
C'est à ce moment que Mathias choisit de rendre visite à Leon, pour lui apprendre que ces derniers évènements semblent étroitement liés à un vampire, résidant dans un très grand château dans les terres de l'est. Sara se révèle être sa captive, il n'en faut pas plus à notre héros pour renoncer à tous ses bien et partir à la recherche de son amour.
La fameuse légende démarre à cet instant…
L'Epicnessless
Alléchant. C'est le moins qu'on puisse dire.
La promesse de grandes révélations, avec l'émergence de Dracula, ses origines, et surtout, l'épopée du premier membre de la famille Belmont-tueurs-de-vampires. On commence cette aventure un peu fébrile, avide de révélations sur la saga, sur une console qui peut enfin nous en mettre plein la vue. Les espoirs sont grands…
… Et la déception proportionnelle.
La narration est malheureusement à l'image de la série : chaotique.
Une introduction intéressante, des personnages charismatiques, quelques rebondissements ici et là mais des scènes rares, des dialogues sommaires et une fin sensée contenter notre soif de Dracula expédiée en cinq minutes. Et c'est ici que le bât blesse : l'absence quasi intégrale du comte. Une simple discussion en fin d'aventure, sortie de nulle part, viendra répondre aux interrogations initiales et ce, de manière bien sommaire.
C'est pauvre, bien trop pauvre pour nous contenter. On attendait quelque chose de puissant, un moment épique au possible pour la naissance la mythologie, à l'image de ce qu'aura tenté Lords of Shadows quelques années plus tard dans un autre registre. Mais non, Konami en a décidé autrement et décide de tirer un trait sur ces deux personnages au potentiel pourtant énorme. Très gros gâchis laissant un goût amer en bouche.
Un peu d'exploration
Vous prenez le contrôle de Leon une fois que celui-ci arrive au sein de ce fameux château.
Zone centrale de toute l'aventure, vous y trouverez un accès vers les cinq différents niveaux puis vers le couloir final. Chaque level est clairement différencié des autres, reprenant les grands thèmes de la saga (chapelle, égouts, etc) bien qu'aussi surprenant soit-il, la
Clock Tower n'est pas de la partie – une première dans la saga. Tous offrent une map relativement grande, composée d'une succession de couloirs et de salles plus imposantes dans lesquelles vous devrez défaire un certain nombre d'ennemis et/ou résoudre une énigme (souvent gentillette) afin de débloquer le passage vers la suite. L'avantage est, qu'une fois la salle débloquée une première fois, vous n'aurez pas à la nettoyer une seconde fois. Et ce point est vraiment le bienvenu car
Lament of Innocence n'est pas avare en
backtracking.
À vous d'avancer suffisamment pour dénicher le boss du level, obtenir sa sphère et ainsi, passer au niveau suivant. Une fois les cinq niveaux purgés des démons, vous n'aurez plus qu'à foncer dans le château au travers de la porte principale qui se sera alors débloquée.
Au cours de l'aventure, Leon va bien évidemment gagner en puissance, tant au niveau de son équipement/armes que de ses combos et objets. Son fouet va du coup gagner en énergie, vitalité, magie (vous découvrirez au passage l'origine du
Vampire Killer !) et vous ramasserez aussi, comme dans les autres épisodes, des armes secondaires (hache, croix, dagues, eau bénite, etc) qui, une fois couplées à certaines orbes, vous offriront un nouvel éventail de combos fortement utiles. Une latitude bienvenue laissée à chaque joueur qui pourra choisir son attaque préférée en fonction de sa manière de jouer. Les combinaisons sont multiples et restent assez équilibrées. Un bon point, mais terni par une lourdeur assez conséquente du gameplay où un certain
input-lag (que l'on espère voulu) se fait sentir.
Selon votre motivation, vous pourrez vous adonner à la chasse aux items, tout comme dans
Symphony of the Night afin d'augmenter le petit Leon au maximum de ses caractéristiques avant la joute finale. Un peu de recherche, quelques énigmes supplémentaires et certains murs friables à faire tomber. Il s'agira d'ouvrir l'œil.
Le problème du level-design
Malheureusement, si tout ceci semble encore une fois complet et bien pensé, les limites du système se font très vite ressentir et un sentiment de frustration vient gagner le joueur dès la première heure de jeu.
Trois des cinq niveaux disponibles semblent presque identiques. Leur architecture et la manière dont vous les explorerez sont sensiblement similaires. Très plats, aucune verticalité, vous enchaînerez couloirs linéaires et salles à vider pour passer à la suivante. Sympathique au début, on s'ennuie malheureusement très vite. Ajoutez à cela le fait que Lament of Innocence ne propose pas de système d'expérience à proprement parler (tuer un ennemi ne vous apporte rien, si ce n'est son loot) et vous comprenez très vite que les combattre est totalement optionnel. S'ensuit alors une exploration en zig-zag, avec un Leon évitant le maximum d'ennemis possibles pour atteindre la salle suivante en un temps record. Deux niveaux sortent heureusement du lot, le Dark Palace of Waterfalls et le Ghostly Theatre, qui arrivent à proposer un peu plus de fraîcheur au niveau de l'exploration, moins limitée à une succession de couloirs et salles identiques. Cela reste tout de même faible. Malheureusement, tout ceci mis l'un dans l'autre freine considérablement l'implication du joueur dans cet univers. On passe le plus clair de notre temps à courir entre les ennemis, ouvrir des portes et attendre que le chargement de la salle suivante veuille bien se terminer. L'exploration de chaque niveau est du coup très laborieuse, l'envie de complétion frôlant le néant le plus total. On s'y oblige tant bien que mal, à défaut d'en être motivé.
La difficulté du titre est largement accessible et ne présente que peu de challenges. Le tout couvert d'une durée de vie très faible, il vous faudra compter cinq heures en ligne droite, puis une à deux heures supplémentaires pour bien tout raser. Heureusement, un mode hard se débloque ensuite, et c'est dans celui-ci que toute la richesse du gameplay pourra s'exprimer. Tout devient alors bien plus nerveux, plus technique et les défauts cités plus haut passent au second plan. Dommage de devoir attendre aussi longtemps…
Image et son
Techniquement, le titre est dans la moyenne du support.
D'un côté, il offre une modélisation tout à fait correcte des personnages couplée d'une animation convaincante, et de l'autre, on s'étonne sans cesse devant le vide incroyable de ces niveaux. Les salles sont vides... totalement vides. Un balcon et peut-être un arbuste viendront en égayer quelques unes, mais c'est tout. Les développeurs mettaient en avant la lisibilité de l'action pour justifier ce choix graphique, mais là encore, on reste très loin de la richesse et de la limpidité d'un
God of War pour ne citer que lui.
Le plus gros défaut venant de ce sentiment de "copier-coller" quasi omniprésent. Toutes les pièces se ressemblent, arborent la même structure et manquent cruellement de variété et de détails. Joli mais vide.
Musicalement, en revanche, c'est la fête. Comme pour la très grande majorité des titres de la saga. Une fois de plus, c'est
Michiru Yamane (
Aria of Sorrow,
Symphony of the Night) qui s'y colle et arrive à fournir quelques pistes vraiment sympathiques. Seul leur nombre très limité viendra nuancer l'ensemble, ainsi qu'une piste vraiment à part, presque de mauvais goût :
Anti-Soul Mysteries Lab. Une piste agressive et utilisée dans un univers moyennement approprié, elle peut très vite agacer pour peu que vous tendiez un peu trop l'oreille.
Lament of Innocence laisse dubitatif. Son système de jeu, basé sur une exploration en détail des niveaux et sur un système de combat réussi - bien que redondant - arrive à convaincre et nous fait passer de bons moments. De même que son ambiance globale couplée à une bonne direction artistique insuffle au jeu une réelle identité. D'un autre côté, la promesse de la Genêse de la saga, celle que l'on attendait depuis une décennie, n'est pas vraiment tenue et reste constamment ternie par des défauts de level design disséminés ici et là. Un titre vite terminé, vite oublié, qui, finalement, aura bien du mal à dépasser son aîné (Castlevania 64), malgré quelques qualités indéniables.
09/05/2016
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- Bande sonore
- Possibilités du gameplay
- L'ambiance
- Techniquement correct
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- Le level-design
- Le scénario
- Durée de vie minime
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GRAPHICS 3/5
SOUND/MUSIC 3.5/5
STORY 2/5
LENGTH 1.5/5
GAMEPLAY 3/5
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