Et ce billet sera en l'honneur de Dragon's Dogma, jeu relativement récent sorti par Capcom sur Playstation 3 et Xbox 360. La température extérieure est de 35°C, le temps est beau et de quelques spoilers sont à prévoir. Nous vous souhaitons un bon voyage dans le vaste monde de Gransys.

WELCOME

C'est tout simple : je n'attendais rien de Dragon's Dogma. Je n'en avais quasiment pas entendu parler, je n'ai même pas daigné regarder les quelques trailers offerts par Capcom. Les "open-world RPGs" ne m'ont jamais vraiment passionné, les quelques jeux du genre sortis ces derniers temps n'avaient rien de transcedant. D'un côté un Skyrim doté d'une ambiance exceptionnelle mais aussi d'un gameplay trop vieux pour procurer le moindre plaisir, de quêtes secondaires trop nombreuses et inutiles, de donjons sans grand intérêt à part quelques rares exceptions et d'un bestiaire sans originalité. De l'autre Amalur, avec de meilleures sensations certes, mais aussi répétitif, peu inspiré et rapidement lassant.

Puis sortit la démo de Dragon's Dogma. Je la télécharge sans m'attendre à grand chose, et malgré l'excellent combat contre le griffon, le tout peine à me passionner. On le sait, mais on se fait toujours avoir : les devs ne savent pas choisir les bons moments de leurs jeux pour les démos. Il faut dire que le genre est mal adapté à ce format : pourrait-on imaginer une version shareware de Skyrim où il ne nous est proposé que de se ballader dans une ville (avec les efficaces murs invisibles) et d'explorer un bout de donjon ?

Hop, expérience oubliée, je laisse ce jeu aux vrais, moi j'ai autre chose à faire, mieux vaut continuer à jouer à [mettez un jeu que vous aimez bien mais pas trop pour rajouter de l'ironie à la chose ici]. Peu après, des critiques commencent à émerger, mais je me contente de les ignorer allègrement comme d'habitude, bien que ces dernières reflètent à peu près ce que je ressentais dans la démo : jeu sympa sans plus, épique mais pas trop, beau mais pas splendide, qui n'apporte rien au grand maître Skyrim (je n'avais évidemment pas approuvé ce dernier point).

Et un jour, comme ça, j'en viens à l'acheter. Bon, ce n'est pas venu sur un coup de tête non plus, les avis dithyrambiques de quelques gens de bon conseil m'ont forcément aidé à me décider. Je me lance. Puis commence le prologue qui, vous en conviendrez, est plutôt moyen. La surprise causée par l'arrivée grand monstre est passée, la faute à la démo toujours. Fin du prologue. Rien ne change. Puis le vrai jeu commence.


Quelques gobelins et une harpie, une journée normale

[Veuillez coller ici trois ou quatre paragraphes parlant du système de pions, de comment l'éditeur de personnages il est trop bien et de comment les classes elles sont équilibrées. Il vous suffira d'aller lire un test lambda sur le web. Il y en a des tonnes.]

SKYRIM + DEMON'S SOULS + SILENT HILL + SHADOW OF THE COLOSSUS + DUNGEONS AND DRAGONS + THE LEGEND OF ZELDA + ASSASSIN'S CREED

Le titre résume bien ce qui va suivre. Dragon's Dogma, c'est un peu un mélange de plusieurs jeux. Mais là où il excelle, c'est quand il arrive à prendre uniquement le meilleur de ces jeux, et à rajouter aussi des tas d'autres éléments, pour arriver à un équilibre quasiment parfait et à se créer sa propre identité.

Les inspirations sont très faciles à voir. Dragon's Dogma prend de Skyrim son monde ouvert, son système de gestion des quêtes, des idées de level-design dans les donjons. De Demon's Souls son côté stressant, sa difficulté assez impressionnante, la peur de s'aventurer dans des endroits inconnus. De Silent Hill des éléments d'ambiance, voire quelques ennemis (zombies ressemblant aux nurses). De Shadow of the Colossus ses combats épiques, ses moments de grandeur et d'immensité, son impression d'écrasement. Du roleplay Dungeons and Dragons ses monstres. De The Legend of Zelda (le premier) le fait de découvrir la map tout seul, de tout devoir faire à pied, encore une fois la difficulté, la diversité des environnements, une map avec quelques ressemblances. D'Assassin's Creed son parkour génial (j'ai passé quelques heures dans Dragon's Dogma à sauter de toit en toit et je me déplace dans la ville par ce moyen ... et il y a un double saut !).


... une identité, de la difficulté, un bon jeu donc.

La carte est incroyablement grande et, chose rare, vous devrez la découvrir seul, à pied, sans moyen de téléportation (le système transpierre/portacristaux apparaît tard dans le jeu et il est difficile de couvrir une grande partie de la map). Pas de souci me direz-vous, ne connaissant pas la dure vérité ... Non, vous n'arriverez pas indemne en voyageant de Gran Soren au Grand Mur. Les monstres que vous croiserez seront nombreux, gros, très résistants, extrêmement violents (un hit = un gros morceau de barre de vie) et ne laissant que très peu de possibilités de s'échapper (système de garde, endurance, ennemis qui n'hésitent pas à vous poursuivre). Dans Dragon's Dogma, vous souffrirez beaucoup. Un conseil : les théraplantes seront vos meilleures amies tout au long du jeu, achetez-en. Beaucoup.

Le sadisme dans le level design de Dragon's Dogma réside en le fait que les déplacements qui vous seront imposés seront longs et vous forceront à passer dans des pièges. Vous ne pourrez pas contourner cet immense rocher, vous devrez obligatoirement passer à côté de ce dragon qui semble invincible et n'hésitera pas à se réveiller. Sans compter qu'une sorte d'ogre vous poursuit, qu'une troupe de bandits devant vous fait tout pour vous attirer vers ledit dragon (en vous attaquant, évidemment, et surtout avec des archers) et que les quelques éléments de soin qu'il vous reste ne seront pas assez pour vous permettre de triompher des deux ou trois cyclopes qui vous attendent au bout de votre route. Joie !

Un autre avantage est le système jour/nuit, probablement le meilleur jamais implémenté. La nuit, l'ambiance est exceptionnelle, mais ce n'est pas seulement grâce à la beauté des décors. Non seulement votre lanterne ne vous permet pas de voir à plus de trois mètres, mais de nombreuses créatures s'amusent à apparaître comme ça, sans prévenir. Des zombies spawnent sous vos pieds, des fantômes visibles de loin se feront une joie de vous offrir de grosses frayeurs, avec des speechs flippants (je vous laisse la surprise), mais ce n'est pas tout ... Les loups font entendre leur hurlements mais demeurent invisibles, des sortes d'ogres se font voir à des centaines de mètres grâce à leur massue qui brille dans la nuit : vous savez qu'ils sont là, mais vous ne pouvez pas les éviter, car ils sont sur votre chemin. Vous comprenez, maintenant, pourquoi vous passerez vos nuits à l'auberge, et pourquoi vous éviterez les raids de nuit ?



Des fantômes et un joli sort.

Car Dragon's Dogma est un vrai jeu à expériences. Vous vivez des choses exceptionnelles, et que seul vous vivrez. Une seule fois. Le jeu se renouvelle sans cesse (d'où la phrase d'introduction ...). Plus que dans n'importe quel autre jeu, vous aurez des choses à raconter. Il deviendrait même presque possible, lors d'un repas entre amis, de ne parler que de vos expériences sur Dragon's Dogma. Les anecdotes et histoires seront nombreuses. C'est ça, un jeu immersif. Un exemple ? Une fois, poursuivi par des loups, je cours, pour fuir, car les loups sont très peu amicaux. Je tombe nez à nez avec un ogre (ceux dont la massue brille dans la nuit, qui font une dizaine de mètres de haut). Terrifié, je fonce me réfugier dans un fort proche. Une fois dans le fort, je monte sur le chemin de ronde. Il était encore là. J'ai passé la nuit à le contempler, fasciné et effrayé à la fois. Inégalable. Une autre ? J'étais dans un autre fort, sur mon chemin pour rentrer dans la ville principale, à Gran Soren. Le chemin est long et complexe, la carte est une grande aide. Cette expédition devient de plus en plus longue et la nuit tombe sans que je ne puisse m'en rendre compte. Mes pions avaient péri lors d'un combat un peu plus difficile que prévu. J'étais seul. Ma lanterne était vide. Seul, dans le noir, et des zombies commençaient à apparaître autour de moi. Je les combattais, ils continuaient à réapparaître. Fuir ? Des fantômes et des sortes de sorciers étaient déjà en train de m'attendre là où je devais passer. Le détour que j'ai pris a duré toute la nuit, mes théraplantes étaient quasiment épuisées, j'ai aussi dû utiliser tous mes items permettant de gagner de l'endurance afin de faire un sprint ininterrompu jusqu'à ma destination.

Moi, je n'ai jamais connu de jeu comme ça. Et vous pensez que le gameplay a été mis de côté pour l'ambiance et l'open word ? Du tout ! C'est même l'un des jeux les plus jouissifs auxquels je ne me suis jamais essayé. C'est Phantasy Star Online ou Monster Hunter, mais en bien mieux, bien plus speedé, bien plus rapide, avec de nombreux sorts différents permettant d'élaborer une stratégie (le sort "je fonce dans le tas en enlevant une barre de vie à un boss" qui enlève quasiment toute l'endurance, le sort classique de soin, l'enchantement d'arme, pluie de flèches, filet, flèche qui traverse toute une rangée d'ennemis (très efficace avec une flèche empoisonnée ou explosive)), sorts graphiquement géniaux soit dit en passant. Chaque classe a des armes particulières (je joue l'assassin, avec deux dagues et un arc, combats jouissifs et techniques sont au rendez-vous !), toutes avec un bon feeling. En somme, si vous vous inquiétiez de ne pas prendre votre pied (comme sur Skyrim par exemple ...), n'hésitez pas et foncez !


Un griffon, la Tour de la Lune Bleue. Dragon's Dogma, quoi.

"I would never violate His Grace's privacy while he violates milady's privates."

Maintenant, il est temps de jouer le critique objectif, qui va parler de son jeu avec des critères objectifs (et donc très cons, mais ça ...). Graphiquement ? N'en déplaise à quelques personnes qui ont du mal à ne pas comparer tout jeu à Battlefield 3, Dragon's Dogma est beau. Peu importe que les textures ne soient pas détaillées, les décors sont assez jolis et divers pour participer à l'ambiance du jeu. Côté écriture ? C'est curieusement assez bon, avec quelques citations assez efficaces (cf. phrase plus haut), les noms des lieux sont poétiques et dans la globalité, les dialogies sont bien écrits. Musicalement ? C'est tout bonnement génial. Les thèmes que vous entendrez le plus souvent seront les meilleurs et ne seront jamais lassants (le matin qui se lève sur Gran Soren avec son thème, pendant que l'on se ballade sur les toits ...) et très bien utilisés (le boss theme presque aussi stressant que celui de Dark Souls). Scénario ? Classique, mais prétexte à de nombreux passages épiques (LES. BOSS. PUTAIN.). Ce n'est pas important, à l'instar du précité Dark Souls (il y a quand même des romances, pour les fans de dating sim / J-RPG). Le jeu aurait des ralentissements ? Très peu sont notables et les plus importants vous sauveront généralement de situations tendues (mais mêmes ceux-là sont mineurs).

Comme je l'ai déjà dit, le plus gros argument de vente (les très gros monstres) ne déçoit pas, avec un bestiaire sorti tout droit de Dungeons and Dragons. Le plus gros avantage étant qu'on ne les combat pas seulement lors des quêtes dédiées, mais aussi en pleine nature ! Une chimère, un dragon endormi, un ogre, des cyclopes, ces mini-boss (enfin, mini ...) seront mêmes assez courants. Ah, et aussi, si vous vous plaignez de ne pas trouver de dragon durant les premières quêtes : quand vous tomberez sur lui, vous regretterez le bon temps où vous étiez tranquille, à affronter un gentil hydre de vingt mètres de haut lors d'une mission.

En conclusion, Dragon's Dogma a été une véritable claque. Plus prenant, plus excitant, plus amusant et aussi plus immersif qu'une grande majorité des jeux auxquels je me suis essayé, il est de loin mon jeu de l'année, et même de la décennie en cours (bon, en 2012, ce n'est pas bien difficile ...). Il a été pour moi ce que Dark Souls ou Skyrim ont été pour d'autres. Je n'ai pas pour habitude de donner une note si élevée, et rares sont les jeux qui la méritent. Ce W-J/RPG de Capcom le vaut largement. Et je n'ai pas encore fini : paraît-il, le boss de fin serait le meilleur de tous les temps, il y aurait une sorte de "2nd quest" et des NG+ à volonté. J'essaierai d'écrire une review (ou je me contenterai d'un court billet) quand je l'aurai terminé. En attendant, je donne cinq étoiles à ce jeu.


Les Sauriens. Vous allez les adorer.

Et au fait, saviez-vous qu'une suite était prévue ?

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