Considéré par beaucoup comme l'un des plus grands RPG de la création, si ce n'est le meilleur, Final Fantasy VI s'offre une nouvelle déclinaison. Loin du portage mitigé de la Playstation, le jeu débarque cette fois-ci sur Game Boy Advance, permettant ainsi à tous de (re-)découvrir un mythe dans la morosité des transports quotidiens.
Et avec des bonus je vous prie, Square Enix ayant décidé de ne pas faire les choses à moitié.
La folie des hommes et des dieux
Il y a très longtemps, trois déesses qui étaient la source de toute magie sur Terre se déclarèrent la guerre, période noire retenue comme "la guerre des Magies". Leur puissance magique était telle qu'elles engendrèrent des "Espers", créatures magique à leur service, aux fantastiques pouvoirs. Hélas, les humains, dans leur quête de puissance et de suprématie, prirent vite conscience des pouvoirs des Espers, et se mirent à se servir d'eux à des fins destructrices. Après avoir été dépassée par leur folie, les déesses prirent conscience de leur erreur et décidèrent de se changer en pierre pour se repentir. Les humains et les Espers se séparèrent, ces derniers s'isolant dans leur propre monde afin de ne plus être manipulés pour de sombres desseins. Les Espers partis en emportant les statues des déesses déchues, la magie disparut du monde des hommes.
La guerre des Magi passée au rang de vieille légende de grand-mère, les hommes se mirent à développer la technologie, source de progrès mais aussi de désastres humains. Le monde est aujourd'hui dominé par l'Empire, qui possède la technologie la plus avancée. L'empereur Gestahl et son bras droit, le machiavélique Kefka, rêvent de domination globale sur le monde. Surtout, Gestahl rêve de s'emparer du pouvoir des Espers, après en avoir été si proche 18 ans auparavant lorsqu'il réussit à s'infiltrer dans leur monde et à en capturer. Depuis lors, de nombreuses expériences sont conduites au sein de l'Empire, et Gestahl ne pense qu'à forcer à nouveau la barrière pour capturer tous les Espers restants.
Le début du jeu nous place dans la peau de Terra, jeune fille amnésique possédant d'étranges pouvoirs, qui est envoyée en mission par l'Empire à Narshe, au nord du continent. Il semblerait que les traces d'un Esper aient été trouvées. Mais, sur place, l'Esper va se réveiller au contact de Terra, et se débarrasser des deux soldats l'accompagnant. Recueillie par la Résistance, Terra va commencer une longue quête identitaire, qui va amener le joueur à contrôler une incroyable palette de personnages.
Emotions
J'ai souvent entendu dire que le scénario de Final Fantasy VI était exceptionnel, et marquait les joueurs à vie. Personnellement, si j'ai trouvé le scénario intéressant, il me semble qu'il n’apparaît pas comme ce qui fait de FFVI un jeu culte, un jeu à part, capable de transporter le joueur comme peu de RPG, et m'a même semblé finalement classique et quelque peu effacé par moment.
Non, pour moi la force du jeu tient dans les scènes, toutes plus cultes les unes que les autres, et dans ses personnages. Oubliez le classique (mais si plaisant) schéma du héros bouseux qui part de son village pour sauver le monde d'une menace (comprenez le grand méchant avide de pouvoir qui va réveiller un infâme vilain qui dort depuis la nuit des temps) et qui va rencontrer au fur et à mesure son équipe. Non, FF6 ne possède pas un héros autour duquel est structuré toute l'histoire. FF6, c'est un ensemble de situations vécues par des personnages (presque) tous charismatiques et travaillés, qui vont se croiser, se séparer, et chacun avoir leurs propres motivations et raisons de se battre (ou non). On est régulièrement émerveillé devant la beauté de certaines scènes (l'Opéra, une des plus belles scènes vues dans un RPG), très souvent ému par les émotions véhiculées (la chute de Doma) ou encore enragé par les actions presque inhumaines de Kefka.
La force du titre, c'est ça, le jeu happe totalement le joueur, qui en oublie presque ce qui l'entoure, non pas par son histoire, mais par la galerie des personnages et les sentiments qui les habitent.
Final Fantasy 6 est un jeu mature, qui évoque les horreurs de la guerre, la quête du soi et la lassitude de la vie.
Le Final Fantasy de la rupture
Final Fantasy VI marquait clairement une rupture dans la saga, et reste aujourd'hui encore un épisode un peu à part. De part sa non présence d'un héros désigné, bien sûr, mais également par l'absence des cristaux, caractéristiques des précédents opus, et par l'ambiance générale du jeu. On pourrait également considérer qu'il s'agit d'un épisode central, transition entre les
FF old school et les nouveaux mettant en avant les phases de scénario et la mise en scène léchée.
Jusqu'alors, les jeux de la série arborait fièrement une ambiance Heroic-Fantasy, et se présentaient vraiment comme une sorte de fantaisie finale. Ici, dès les premiers instants, on se retrouve devant une ambiance quelque peu Steampunk, teintée de fantaisie, tandis que la deuxième moitié du jeu (on peut considérer que le jeu est découpé en deux parties majeures) vire vers le Baroque Post-Apocalytpique. Une orientation qui a surpris (souvent positivement) les fans de l'époque, et qui devraient surprendre à nouveau ceux qui se sont replongés avec délice (ou horreur, selon l'épisode) dans les origines de la série grâce aux multiples portages de
Square Enix, qui aime donner l'occasion à ses fans de redécouvrir les jeux qui ont fait sa légende (à moins qu'il n'y ait quelque appât du gain là-dessous ?... Non...).
Enfin, la deuxième partie du jeu abandonne totalement les indications, et le joueur est livré à lui même, devant chercher les infos, et oublier la linéarité des précédents sur Super Nintendo. Une sorte de retour aux sources, qui rappelle le premier
Final Fantasy, sans jamais être lourd, contrairement à ce dernier.
C'est aussi le premier (et le seul dans une certaine mesure)
Final Fantasy qui permettait de choisir son équipe parmi un grand nombre de personnages (14, dont certains tout de même bien cachés), avec de nombreux splits qui donnent lieu à la constitution de plusieurs équipes différentes.
La direction artistique avait une nouvelle fois été confiée à
Yoshitaka Amano et son style si caractéristique. Si son style pour les artworks et les visages m'a toujours laissé une certaine impression mitigée (certes, certains parleront d'art, mais est-ce vraiment approprié à un jeu vidéo ?), on se régale toujours devant le bestiaire du jeu, fabuleux, varié et d'une beauté sublime.
Une certaine perfection vidéoludique
Mais que ce serait un jeu culte sans un gameplay solide et un équilibre parfait ?
Final Fantasy VI reprend évidemment le fameux ATB, et des combats à quatre combattants. Loin des personnages façonnables de FF3 ou FF5 mais finalement sans réelle identité en combat, le jeu intègre des "skills" propres à chaque personnage. Ainsi, Locke pourra voler des objets, Sabin utiliser les fameux Blitz (coup d'art martial nécessitant une petite manip' à la manière d'un jeu de combat) et Gau partir quelques combats le temps d'assimiler les techniques des monstres de la zone, par exemple. Chaque personnage est à ce sens vraiment unique, tant par son background et sa personnalité que par ses compétences propres. Pour autant, Square ne délaissait pas la possibilité de modeler un minimum les membres de l'équipe à sa façon. Au cours du jeu, on récupère de nombreuses magicites, reliques contenant l'essence et la puissance des Espers. Ces petits bouts de métal donnent accès aux fameuses invocations, que l'on peut utiliser une fois par combat, et qui permettent de lancer des magies dévastatrices, de se guérir ou d'augmenter ses diverses défenses.
Quel rapport avec la customisation de ses troupes ? J'y viens!
En équipant ces fameuses magicites, on permet non seulement aux personnages d'apprendre de nouvelles magies (graduellement avec les combats), mais également de moduler les gains de caractéristiques au passage de niveau. Si les premières donnent des bonus négligeables comme +1 d'attaque ou de défense, les dernières magicites donnent des bonus tels que HP+50% ou MP+50%. Il devient alors aisé de monter une véritable brute ou un magicien, ou bien sûr en prenant le temps, un guerrier polyvalent capable de tout.
Le jeu est par ailleurs parfaitement équilibré, la difficulté étant croissante et jamais oppressante, contrairement à bien des jeux de la génération 16 bits. De même, la fréquence des combats est simplement parfaite, on échappe aux classiques affrontements tous les deux pas qui donnent envie de se jeter par la fenêtre. Les lieux sont incroyablement bien pensés, variés, et demandent toujours un minimum de réflexion. Enfin, il est à noter que le jeu n'est pas avare en quêtes annexes, plus qu'intéressantes pour développer le passé des protagonistes, ou encore pour se mesurer à des défis plus ardus que de coutume.
Pureté éternelle
Techniquement, le jeu faisait honneur à la Super Nintendo. La conversion fidèle n'est certes plus époustouflante de nos jours, mais les graphismes restent toujours aussi agréables et pleins de charme. Les sprites des différents persos sont mignons, et possèdent plusieurs expressions pour bien souligner les émotions vécues. Les décors sont fins et détaillés, avec souvent du scrolling différentiel du meilleur effet. Mais ce qui a toujours été brillant dans les
Final Fantasy, ce sont les ennemis lors des combats.
Final Fantasy 6 n'échappait pas à la règle, avec des monstres souvent énormes, originaux et d'une beauté rare. Mais, comme il faut un mais, ils sont hélas une nouvelle fois statiques.
Toujours au rayon technique, on peut noter les excellents effets de transparence et de déformation accompagnant les magies et attaques spéciales, qui restent un régal pour les mirettes, et ce même plus de 10 ans après la sortie originale. Il n'y a donc rien à craindre de ce côté. Même presque non retouché, la technique du jeu fait toujours mouche, et n'a pas grand chose à envier aux meilleures productions de la portable de Nintendo.
Enfin, comme il faut garder le meilleur pour la fin, parlons de la bande-son.
On a rarement entendu si pures, si belles et si émouvantes compositions. Cela restera comme
le chef d'œuvre de
Nobuo Uematsu (No-bu-o), pourtant pas le dernier quand il s'agit de pondre des compositions de premier ordre (preuve encore avec
Lost Odyssey). Mais ici, le maître était à son apogée, maniant son art comme Zidane manie le ballon (ouais bon, restons abordable à tous, surtout aux beaufs comme moi). Alors que j'avais déjà fini plusieurs fois le jeu, j'ai une nouvelle fois été émerveillé, arrêtant souvent de jouer pour laisser tourner la musique (et la siffler dans le métro lors du passage mythique de l'Opéra, je suis passé pour un gros geek, pas très grave, j'en suis un!).
Une bande-son inoubliable, souvent citée à juste titre comme l'une des meilleures jamais entendues.
Mais...
Les joies du portage
Premier constat, la qualité sonore en a pris un sacré coup. Si le jeu original impressionnait par la maîtrise du processeur sonore de la 16 bits de Nintendo et en tirait toute sa quintessence, ce remake écorche les si belles sonorités de nos souvenirs. Son un peu saturé, qualité au rabais, on est clairement déçu. Mauvais travail de Square Enix ou réelle limitation de la console ? Difficile à dire, et l'on finit par s'y habituer, les mélodies restant toujours aussi somptueuses.
Passée cette déception, il faut bien honnête, le reste est un long chemin de sans faute, qui fait passer la pilule sans problème.
La version Super Nintendo souffrait de quelques bugs ? Ils ont été corrigés.
La traduction était considérée comme peu fidèle à la version japonaise par moment ? Elle a été retravaillée.
Et pour ceux qui n'aiment pas l'anglais, on peut passer le jeu en français, avec une traduction plus qu'honnête. De ce côté là le travail est réalisé est de qualité, ce qui ravira les fans.
Mais, depuis Final Fantasy IV Advance, qui proposait de très nombreux ajouts intéressants, le fan est gourmand, on en attendait donc autant ! Inutile de le cacher, il y a bien moins d'ajouts, mais le jeu original n'en nécessitait pas vraiment. On pourra donc citer les deux nouveaux lieux, pour les plus acharnés, les nouveaux Espers, les nouvelles magies, ainsi que la présence désormais classique d'un bestiaire consultable et d'un sound test.
Des ajouts plaisants, qui pourraient convaincre les derniers réfractaires aux portages/remakes de se laisser tenter.
Du bon boulot, pour un jeu de légende.
Véritable ode à la poésie, Final Fantasy VI débarque sur Game Boy Advance précédé d'une flatteuse réputation. Faisant partie de ces RPG intemporels, il devrait passionner les joueurs qui n'ont pas eu l'occasion de le découvrir, ou tout simplement ceux qui ont envie de refaire l'un des meilleurs RPG de la création dans les transports, bonifié par les quelques ajouts judicieux.
Tout juste pourra-t-on regretter une perte de qualité dans le son, mais ce n'est qu'une goutte de saturation au milieu d'un océan de perfection.
06/08/2008
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- Un jeu parfaitement équilibré
- Le bestiaire du jeu
- Les personnages, (presque) tous très travaillés
- Les bonus, discrets mais excellents
- Les musiques fantastiques malgré...
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- ...une perte de qualité sonore qui sature un peu
- Assez court en ligne droite
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GRAPHICS 4/5
SOUND/MUSIC 3.5/5
STORY 4/5
LENGTH 3.5/5
GAMEPLAY 4.5/5
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