Avant que je me décide enfin à acheter une Nintendo Switch, j'ai sondé le forum de Legendra pour glaner les opinions des uns et des autres, afin de m'aider à me décider s'il serait mieux d'acquérir comme premier jeu Triangle Strategy ou The DioField Chronicle. C'était unanime et on m'a encouragé fortement à opter pour Triangle Strategy que j'ai énormément aimé. Une fois ce merveilleux RPG tactique terminé, et après avoir laissé décanter mon expérience, ma curiosité m'animait pour donner une chance à ce second choix. Peu de temps après, sa boîte de jeu s'est ajoutée à ma nouvelle petite collection de jeux Switch.
Incursion dans un soap-opera politique
Sur la grosse île de DioField, le royaume d'Alletain est relativement épargné des conflits qui se passent sur le continent entre l'Empire Trovelt-Schoevien et l'Alliance Rowetale. Cependant, une attaque nocturne survient à la résidence Lestershire où séjourne le quatrième prince, Levanthia Shaytam. Malgré les secours de ses deux jeunes amis, Andrias et Fredret, ils tombent dans une embuscade et Levanthia se fait assassiner froidement. Il portait sur sa main, la marque bénite, preuve de sa légitimité en tant qu'héritier du trône.
Une fois la partie commencée, on nous emmène huit ans plus tard. Une cinématique replace l'action dans une forêt où une carriole poursuivie par des hors-la-loi se retrouve finalement accidentée. Il s'avère que trois mercenaires ‒ Andrias, Fredret et Iselair ‒ viennent à la rescousse en ne ménageant pas leurs efforts pour accomplir leurs plus belles prouesses ! On découvre que la personne à bord, Lorraine Luckshaw, travaille pour le Duc William Hende, influent personnage du consul des seigneurs (Lords). Celui-ci aurait récemment formé une unité militaire privée dans laquelle le trio sera invité à se joindre, vu leurs étonnantes steppettes.
Ainsi se présente à nous les débuts intrigants et prometteurs de l'histoire de DioField Chronicle. Nous serons témoins de l'influence croissante de cette petite armée qui sera connue plus tard sous le nom des Renards Bleus (Blue Foxes) dans l'échafaudage politique.
Le Camp d'Elm
Dans le camp Elm, bâtiment chic et sobre qui sert de point central entre les missions, Andrias est celui que l'on contrôle généralement, avec une vue à la troisième personne. Il s'agit du seul lieu où l'on peut se promener librement afin de prendre connaissance de l'humeur des autres et des rumeurs qui courent, des quêtes annexes et des prochaines missions. C'est là qu'on fera aussi des emplettes, plus tard des investissements en recherche et développement et en tout ce qu'il faut pour améliorer les compétences des quatre classes de combat. Une table avec une carte du monde, comme celle qui se trouve dans la salle des missions principales, nous propose de refaire les opérations précédemment accomplies pour continuer à gagner de l'expérience et aussi récupérer les bonus manqués.
Il y a une bibliothèque dans laquelle on peut se remémorer l'état des affaires politiques de chaque chapitre parcouru. Le tout est simplifié par des schémas. On peut s'instruire sur le passé des personnages importants du jeu, des différentes contrées parcourues, des forces politiques de DioField et du continent, ainsi que de multiples autres sujets. Pour terminer, on peut réécouter les scènes d'histoire comme les briefings avant les missions et les événements pendant et après celles-ci en plus des moments de narration qui expliquent les situations géo-politiques. Bref, la bibliothèque vaut le détour quand on ne comprend pas trop ce qui se passe.
Dans ce lieu qui nous sert de port d'attache, on se sent un peu confiné. Les décors sont épurés, malgré quelques détails agréables, dont les tableaux, assez jolis. Les fenêtres ne donnent pas de vue sur l'extérieur, c'est tout blanc ! On ne sait pas à quoi ressemble le dehors, excepté en combat, avec une vue de haut. Tout cela crée un petit sentiment de vide.
Batailles vues à vol d'oiseau
Étant donné que l'on joue ici à un RPG tactique mélangé un peu à de la stratégie en temps réel, les batailles sont pratiquement le coeur du jeu.
Durant ces affrontements vus de haut, on doit sélectionner un ou l'ensemble des personnages et les guider vers les ennemis qui ont un champ de vision un peu court. On les regarde courir puis, au bon moment, on arrêtera le temps pour choisir une compétence ou une attaque spéciale ou simplement pour donner l'ordre d'attaquer. On regarde ensuite le combat se dérouler. Il y a un avantage à surprendre l'ennemi ou à frapper dans son dos. Ce n'est pas beaucoup plus compliqué que cela. C'est assez agréable en début de partie, mais avec le temps, il est aisé d'atteindre ses objectifs sans transpiration ni panique.
L'unité de combat est composée d'un maximum de 8 personnages. Les quatre principaux seront ceux que nous déplacerons et ferons attaquer sur le champ de bataille. On peut se servir des quatre autres, couplés aux premiers sous forme de duos, pour utiliser leurs compétences et aussi pour les interchanger avec les premiers qui pourraient être trop amochés en pleine action.
Les quatre classes de combat portent un logo avec couleur et se résument à :
- Bleu -> Corps-à-corps;
- Rouge -> Cavalerie;
- Vert -> Armes de portée;
- Mauve -> Magies.
Avec seulement 4 personnages actifs, la stratégie s'en trouve un peu simplifiée, mais c'est amplement suffisant pour accomplir les tâches que l'on nous confie. Pour ma part, j'aurais aimé pouvoir en contrôler au moins le double en même temps.
En général, les objectifs d'une opération se ressembleront et vous reconnaîtrez les classiques. Il faudra anéantir tous les ennemis ou une cible précise, atteindre des points sur la carte comme des tourelles pour ouvrir des ponts-levis, protéger des barricades et escorter des convois.
En plus des objectifs principaux à accomplir, le jeu nous encourage à nous dépasser un petit peu avec d'autres sous-objectifs. Réussir la mission en moins de 5 minutes ou ne laisser personne périr au combat pourra nous donner par exemple, un cristal pour améliorer nos «orbes magilumiques», sortes d'incantations nous rappelant les espers dans Final Fantasy.
À mesure que l'arbre de compétences évolue, se débloqueront des attaques plus puissantes qui déclencheront une prise de vue cinématographique du plus bel effet. Dans le même registre que l'usage des orbes incantatrices, la caméra s'approche des personnages et on aperçoit aussi, à cette occasion, la beauté des paysages et des architectures des lieux qui entourent l'action.
C'est assez dommage, je trouve, que l'on n'ait pas exploité d'autres plans de caméra durant les combats en dehors de ces cas. En naviguant sur la carte, lorsque le jeu était sur pause, je découvrais des villes et des lieux naturels assez travaillés. J'ai pu zoomer pour voir un peu plus les détails, mais la perspective imposée ne met pas en valeur le travail accompli sur l'architecture et sur les paysages, comme par exemple, lorsque l'on a une vue à la troisième personne au Camp d'Elm. Cette constante utilisation de la vue de haut nous éloigne des interactions et dialogues que les personnages ont et c'est du potentiel perdu, selon moi. Il me semble que seulement quelques mouvements de caméra à la hauteur de l'action auraient été vraiment intéressants et dynamiques.
L'histoire en lente pente descendante
L'histoire démarre correctement en début de jeu, sauf qu'en cours de route, elle peut finir par décevoir. Je suis généralement bon public, même pour les trucs moyens, alors pour moi, elle a su maintenir mon engagement. Il faut s'attendre à des situations prévisibles et à des rebondissements un peu décousus.
Le ton donné est assez sérieux et cela permet de sauver l'expérience globale. Il y a un équilibre dans la quantité des dialogues.
J'ai aimé le caractère particulier du personnage de Waltaquin, recrutée dès le premier chapitre. De mon point de vue, c'est elle qui ressort le plus du lot. Avec une mise à jour gratuite, il y a possibilité de l'incarner durant les chapitres 4 ou 5. Ce n'est pas quelque chose que j'ai pu tester, car j'ai joué à la version originale de la cartouche, mais je tiens à le souligner. J'ai lu que cela n'apportait pas beaucoup à l'histoire, mais je me dis que cela ne peut pas non plus lui nuire...
J'ai aimé ce qui dérogeait de l'histoire, ces petits à-côtés dans le Camp d'Elm, d'aller parler à tout le monde au début d'un nouveau chapitre ou entre deux missions et déclencher des quêtes annexes. Cela enrichit un peu l'expérience et cela rend chaque membre de l'équipe un peu plus charismatique. Chaque scène de dialogue de quête annexe, aussi petite soit-elle, a été doublée avec des voix et cela m'a plu.
La répétition
La répétition est malheureusement la petite épine qui se loge dans le pied durant l'expérience de DioField Chronicle. On s'étonnera des cris de mort, identiques pour chaque adversaire tombé, tout le long d'un même combat. Vous entendrez dans vos rêves pendant plusieurs nuits un écho au loin : «Lo-o-ong li-i-i-i-ive the Empire !». Le même traitement est donné aux attaques spéciales utilisées en combat, qui viennent avec l'unique phrase de celui ou celle qui l'utilise.
La trame sonore, que j'ai sincèrement appréciée, est plus courte que les gros jeux sur le marché car elle ne comprend que 23 morceaux. Elle donne l'impression d'être plus écourtée car la musique des combats est toujours la même à l'exception de celle de l'ultime combat final. C'est un peu dommage, car le travail de composition de Ramin Djawadi et de Brandon Campbell garde une atmosphère et instrumentation commune entre les différentes pièces musicales. Certains segments me donnent des frissons. Cette trame sonore donne du corps à l'univers de ce jeu qui a manqué de peaufinage et possiblement de budget pour satisfaire ses joueuses et joueurs au coeur ardent, désirant toujours un peu plus.
La succession des combats et missions annexes m'a souvent donné l'impression de faire toujours la même chose. J'ai réalisé à partir du deuxième ou du troisième chapitre que je pouvais toujours utiliser la même série d'aptitudes. J'avais une recette secrète, toute simple soit dit en passant, permettant de passer au travers de toutes les armées et tous les monstres sans soucis. J'espérais frapper un mur ! Il n'est jamais vraiment arrivé... et j'ai continué de foncer les yeux fermés. Blim! Blam! Les missions réussies se sont enchaînées sans souci ! Malgré tout, j'ai décidé de tenir bon la cadence en variant légèrement les sauces et j'ai fini par atteindre la fin du jeu sans réel défi. Heureusement, les scènes d'histoire apportaient une distraction appropriée pour maintenir ma motivation même si devenait plus inintéressant à force que je m'approchais de la fin.
J'aurais aussi aimé être plus souvent forcé à jouer avec les différentes recrues des Renards Bleus. Cela m'aurait obligé à varier les stratégies et à découvrir de nouvelles forces cachées.
Et caetera : Quelques autres détails avant de conclure
J'ai aussi aimé les attirails de tous les alliés qui se joignent aux Renards Bleus. Il y a des teintes de bruns, de couleurs foncées et nombreux portent vraiment ce qu'il faut pour combattre. Tout le monde a de la gueule sans non plus trop briller ! La robe blanche de Waltaquin (et aussi celle d'une autre dame) ne se porterait peut-être pas pour la bagarre, mais bon, on est dans un jeu vidéo. J'ai trouvé que les personnages féminins, même si elles sont conçues autour d'une structure corporelle similaire, ne tombaient pas dans les clichés hypersexualisés abondants des RPGs asiatiques. J'aurais aussi aimé voir plus de lead féminin.
J'ai joué à DioField Chronicle avec les doublages et les textes en anglais. J'ai trouvé le tout assez bien exécuté pour tous les dialogues en général. Peut-être préfèreriez-vous l'audio japonais qui doit être tout aussi bien ou mieux encore. La version française, sans doublage, sera à vous de juger. Je l'ai seulement testée pour faire les captures d'écran, mais elle existe bel et bien.
Même si le jeu n'excelle pas nécessairement dans tout, il y a néanmoins une proposition d'univers médiéval-fantastique avec un-je-ne-sais-quoi d'une autre époque qui me plaît : les lieux et leurs architectures, la musique, les personnages et leur styles vestimentaires, la magie et la technologie expérimentale qui se côtoient.
Mention spéciale aussi aux illustrations vraiment belles qui servent aux moments narratifs entre les missions et chapitres : c'est toujours quelque chose qui m'interpelle quand je les attrape du regard !
The Diofield Chronicle est un jeu avec du potentiel qui a manqué de peaufinage. Qu'aurions-nous pu découvrir, s'il y avait eu une année ou même six mois de travail de plus ? Comme disait l'autre : « Chaque RPG qui sort sur le marché est un miracle ! ». Il vaut au moins le coup d'oeil, voire le détour si vous avez envie de lui donner sa chance. Ce ne sera pas nécessairement votre coup de coeur de l'année, mais certainement pas une expérience négative en l'accueillant tel qu'il est.
Je terminerais en suggérant de jouer en mode de difficulté «Difficile» parce que mon expérience en mode «Normal» manquait de défi. Pensez aussi à mettre le jeu à jour pour jouer le chapitre avec Waltaquin et pour vous permettre de jouer avec la difficulté «Très difficile», au cas où la tentation vous guetterait !
24/01/2025
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- Proposition intéressante d'hybride de RPG tactique et de stratégie en temps réel
- La trame sonore, même si elle est relativement courte
- L'esthétisme des personnages
- Univers médiéval-fantastique avec un-je-ne-sais-quoi d'une autre époque
- Illustrations jolies
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- L'histoire qui va en pente descendante
- Sentiment de répétitivité au fil des combats
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