"Eh les mecs, j’ai pensé à un concept révolutionnaire. On va faire un jeu original avec un loup qui sera en fait la réincarnation de la déesse du soleil, qui saura peindre, utiliser une épée, sauver le monde et le plus fort, c’est qu’on fera un style graphique unique qui ressemblera à une estampe." Dis comme ça, on se demande vraiment qu’elle était la marque du saké utilisé pendant les phases de brain storming d’Okami par les développeurs du studio Clover. Et pourtant ce grand jeu à tout pour séduire, preuve s’il en est que l’on est pas obligé de sortir une énième suite extra classique pour faire un bon produit. Voyons ça plus en détails.
Synopsis
Cent ans auparavant, le grand guerrier Izanagi décima le méchant dragon Orochi qui s’apprêtait à dévorer son amour grâce à l’aide inespérée d’un magnifique loup au pelage blanc du nom de Shiranui. L’honorable animal ne s’en tira malheureusement pas, alors le village entier honora sa mémoire en construisant une statue. Au commencement de notre aventure, la déesse du soleil Amaterasu Omikami alarmée par de graves perturbations dans le monde s’incarne dans la statue de pierre et prend la forme d’une louve pour restaurer équilibre et paix autour d’elle.
Loin de partir seule dans cette longue quête. Elle sera accompagnée par Issun, un jeune artiste à la taille minuscule et au potentiel comique fort compensant sans problème le mutisme de notre héroïne, ainsi que par la bénédiction des kamis. Ces 13 divinités à retrouver vont lui conférer autant de techniques de peintures nécessaires à la bonne avancée de l’aventure. Enfin notre déesse saura vite s’armer d’instruments divins : miroirs, rosaires (fonctionnant comme des fouets) et épées.
Développement
Okami fait très fort en intégrant une bonne quantité de culture japonaise. Aussi, aucun personnage n’est réellement choisi au hasard et le fan aura l’occasion de découvrir que presque chaque nom utilisé dans le jeu renvoie à une légende ou à une divinité japonaise. Pour ne reprendre que le début de l’aventure, Susano le descendant d’Isanagi est le frère d’Amaterasu dans la mythologie japonaise. Banni du monde des dieux, il se marie avec une jeune fille qu’il sauva des griffes d’un dragon nommé Yamata no Orochi, étrange coïncidence. Les références mythologiques sont d’autant renforcées par l’omniprésence de la culture shintô. Trois des quatre principaux préceptes de la plus vieille religion du japon servent ainsi de piliers au jeu. L’importance de la famille et le respect des différents festivals sont des thèmes récurrents mais le plus flagrant reste la place toute particulière laissée à la nature. Le shintoïsme prône la vénération des choses naturelles car même leurs plus petits et insignifiants représentants sont proches des divinités. Aussi on va passer le plus clair de notre temps à rétablir l’équilibre naturel en redonnant vie aux plantes, à manger aux animaux et de la lumière aux lieux. Bien entendu, la majorité des divinités apparaissant dans le jeu, à commencer par Amaterasu, appartiennent à ce culte.
Plongeant amèrement dans la mythologie japonaise, Okami lui emprunte une bonne part de sa tragédie pour son scénario. Aussi, ne vous laissez pas avoir par le graphisme coloré, notre déesse a vraiment fort à faire dans ce monde recouvert de ténèbres. Nombreux sont les personnages principaux à mourir des mains des trois démons que vous aurez à combattre. Le jeu s’adresse à tout le monde, le fan de culture japonaise sera séduit par les références, l’adulte par le scénario sombre et passionnant alors que l’enfant qui sommeil en vous appréciera le dernier point : l’humour omniprésent. A la manière de Midona dans le dernier Zelda, Issun vous fera souvent sourire par ses monologues égoïstes et très portées sur la critique de notre héroïne, incapable de répondre mais assez prompte à mordre. Autre élément comique fort, les personnages secondaires sont généralement bouffons au possible, multipliant situations incohérentes (le moineau qui veut s’immoler par le feu pour faire revenir l’eau de la fontaine) et design improbables (le papi bambou).
D’un point de vu ambiance et scénario, Okami se veut à la fois complet et diversifié de manière à convaincre tout le monde.
Gameplay
Un peu à la Zelda, chaque nouvelle zone se découpe en deux phases. La première introduit le donjon, nous obligeant à trouver différentes personnes disparues, objets et autres pouvoirs nécessaires à l’ouverture et à l’avancée dans l’antre du boss. Et la seconde, bien entendu, c’est le donjon lui-même se terminant donc par le grand méchant. A l’inverse d’un Zelda-like, la première partie est ici dix fois plus longue que la deuxième, c’est d’ailleurs ce qui permet à l’ambiance et au scénario de se développer autant. D’une intensité rare et souvent très originaux avec des passages mémorables comme la course contre le parchemin ou la préparation du repas des démons, les donjons ont quand même un gros défaut, ils sont trop courts.
Mais venons-en à la peinture, probablement l’ajout d’Okami lui conférant un maximum de fraicheur. En pressant la touche R1, le jeu se met dans une sorte de pause et un pinceau apparait à l’écran. En traçant des traits pour relier différents éléments ensemble ou tout simplement en dessinant des formes prédéfinies, vous pourrez faire réagir votre environnement à vos moindres désirs. Ca va de la reconstruction d’un élément de décor détruit à l’utilisation d’une source de feu pour débloquer un passage. Tout ce qui dans un autre jeu aurait demandé des passages exaspérant dans son inventaire pour sélectionner le bon objet demande simplement ici de connaître quelques formes simples. Grâce à ce procédé, les phases de plates-formes et les énigmes sont aussi nombreuses et diversifiées que traitées avec grand soin, sans lourdeur.
Les combats se déclenchent en passant sur les ennemis. Une sorte d’arène se forme et la bataille commence sans coupure avec l’exploration. Trois armes s’offrent à vous, les rosaires sont très rapides et bénéficient d’une bonne portée, les épées sont très lentes mais totalement dévastatrices et enfin les miroirs représentent un peu le juste milieu. A vrai dire, on finira tous par utiliser exclusivement les trop efficaces épées. Un peu plus d'égalisation n'aurait pas fait de mal. Outre les coups basiques, vous aurez là encore la possibilité d'utiliser le pinceau. Pour comparer à nouveau le jeu à un Zelda-like, ici presque tous les ennemis ont un ou deux points faibles particuliers mais nul besoin d'utiliser un objet spécifique, c'est tout simplement le bon dessin qui vous sauvera. Coup d'épée de lumière sur un adversaire figé, utilisation du pouvoir du vent sur ceux qui se protègent par une ombrelle ou encore exploitation du temps orageux contre un sabreur qui aime un peu trop lever son arme. Tout est bon pour mettre la cible en difficulté avant de la rouer de coups de façon plus conventionnelle.
S'il fallait trouver un ou deux défauts au gameplay pour contenter tout le monde au milieu de toute cette qualité. On pourrait éventuellement citer un peu de redondance. Les combats dans une même zone ont la fâcheuse tendance à se ressembler or il est plus que conseillé d’en enchaîner un minimum pour maintenir les finances de la louve. Dans le même ordre d’idée, on pourra trouver un peu ennuyant le fait d'avoir à re-combattre plusieurs fois les mêmes boss. Aussi ce n’est pas moins de trois batailles que l'on livrera contre un Orochi étrangement semblable et de plus en plus faible face à notre équipement. D’ailleurs, Clover n’aurait pas perdu grand-chose à nous proposer une difficulté un poil plus relevée, les jeux faciles sont à la mode et c’est dommage.
Vous avez aimé Zelda mais vous trouvez que la série peine un peu à se renouveler. Vous aimez l'originalité ajoutée à une maîtrise parfaite du jeux d'aventure ? Okami est fait pour vous.
Technique
Si vous n’aviez jamais entendu parler du graphisme d’Okami alors c’est erreur réparé grâce à ce test. Comme vous l’aurez probablement remarqué avec les screenshots, le parti pris des développeurs est de faire ressembler leur jeu à une estampe. Pour ceux qui n’auraient aucune idée de ce à quoi peut bien ressembler ce genre de tableaux et qui n’ont jamais visité le jardin de Monet, je vous mets une image ci-dessous.
Alors forcément, le jeu n’est pas dans la droite lignée de ce qui se fait actuellement où l’amélioration graphique constante passe par le full 3D HD bourré d’effets à faire suer le chipset interne des consoles. Et pourtant, le rendu est aussi unique que magnifique. C’est certainement, à sa façon, le plus beau jeu de l’année. Le plus bluffant restant la densité du décor pourtant très détaillé rendant le tout presque naturel. Et puis le travail sur les ombres est un vrai sans fautes, on a vraiment l’impression que de subtiles coups d’encre noire ont été déposés sur une toile.
Enfin les combats et les utilisations récurrentes du pinceau sont de bonnes occasions de vous régaler à nouveau les yeux. L’animation est superbe, chaque coup est réalisé à la perfection et on s’étonne même de finir par trouver naturelle la façon dont la louve se bat à l’épée. Chaque attaque est suivie d’une débauche d’effets lumineux suivant la trajectoire du coup, dynamisant l’action à l’écran et subliment les scènes. De même, les différentes techniques de pinceaux possèdent toutes une petite animation. Que ce soit un déluge de feu, une épaisse fumée bleue ou une liane vous agrippant pour vous projeter vers les cieux... tout est incroyablement détaillé. Rien que poser le pinceau sur la terre vous fait pousser une végétation abondante alors que la louve elle-même se déplace en étant suivie d’une ribambelle de fleurs.
Enfin, l’OST est une pure merveille et je pèse mes mots. Composée de pas moins de cinq CD, les pistes se suivent et ne se ressemblent pas. Là encore, on sent le ton unique que les développeurs ont voulu donner à l’œuvre. Le style musical purement asiatique rappelle ce que nous autres européens avons surtout pu découvrir dans les films de samouraï. Si à la première écoute, on aura l’impression d’entendre principalement des instruments à vent, il en est tout autrement. La majorité de l’orchestration au synthé reproduit les sons de petits instruments japonais à corde, traditionnellement joués par des femmes avec leurs bijoux. Par exemple, on est enclin à penser que l’opening du jeu est joué à la flute alors qu’il s’agit bien d’un instrument à corde. Enfin le compositeur est un vrai maître et mélange sans mal les ambiances tristes aux scènes les plus joyeuses. Pour s’en donner une bonne idée, je ne saurais que trop recommander deux des musiques du CD3, "giving kushinada a ride" pour le côté dramatique et "Seiankyou commoners' quarter " pour son contraire. Pour ne bien sur citer que deux pistes parmi toutes celles qui s’écoutent en boucle sans problèmes.
(Merci à Seph pour ces détails musicaux)
Okami est avant tout une aventure unique issue d’un studio brillant, un des rares encore capables de sortir un jeu novateur. Si le gameplay aurait tendance à en faire le Zelda de la Play, les très nombreux ajouts empêchent totalement l’utilisation du mot plagiat, l’élève dépassant peut être même le maître. Que ce soit par l’utilisation du pinceau remplaçant le trop lourd inventaire de la majorité des A-RPG, l’ambiance fabuleuse d’une histoire se déroulant dans un monde riche empreint de référence mythologique ou les graphismes magnifiques au style si particulier. Encore un "must have" pour la console de Sony avec ce jeu passionnant qui vous collera littéralement à la manette pour une quarantaine d’heures de pur bonheur.
30/09/2007
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- Très original
- Style graphique unique et magnifique
- Gameplay dynamique et maîtrisé
- De l'humour à la tragédie, un jeu complet
- OST superbe
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- Un peu facile
- Des redondances dans les combats
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GRAPHICS 5/5
SOUND/MUSIC 5/5
STORY 5/5
LENGTH 4.5/5
GAMEPLAY 4.5/5
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